Championnat du monde de course au large en double mixte, avantage aux Français dans la tempête bretonne

 

L’automne breton n’a pas été tendre avec les équipages du Championnat du Monde de course au large en double mixte. En guise de comité d’accueil, une rugueuse tempête comme la pointe armorique en a le secret a obligé la direction de course à quelques aménagements pour assurer la sécurité des 22 équipages internationaux engagés dans la compétition.

Crédit : A Beaugé


30 noeuds et 3 mètres de vague

Partis mercredi 25 septembre avec une heure de retard pour laisser passer le plus fort de la dépression, les onze concurrents de la première course qualificative, la “Département du Morbihan Race”, auront tout de même rencontré des conditions intenses, avec des rafales à plus de 30 nœuds et des creux de trois mètres. Dans leur progression jusqu’à la pointe de Penmarch, au Nord des Glénan, les duos auront ainsi pu tester leur nouvelle monture, le Sun Fast 30 One Design. Et avec des pointes de vitesse tutoyant les 20 nœuds, c’est peu dire que ce monocoque de 10,4 m dessiné et construit en France a montré ses solides capacités dans la brise !

D’abord menée par l’équipage américain formé par Barbara Karpinska et Kevin Morgan, la course a vite basculé en faveur des francophones, avec un joli duel entre le binôme français, composé des spécialistes du Figaro Charlotte Yven et Loïs Berrehar, et le tandem belge, dont les marins Djemila Tassin et Jonas Gerckens s’entraînent à l’année à Lorient. Victimes d’une petite avarie sur leur écoute de spi, ces derniers ont toutefois dû freiner un temps leur folle cavalcade, se faisant ravir de six minutes seulement leur deuxième place par un équipage uruguayen aux abois, parfaitement mené par Justina Pacheco et Federico Waksman, vainqueur de la Mini Transat 2023 avec un projet installé à Lorient La Base. Preuve que la connaissance des lieux et des facéties météorologiques bretonnes constituait tout de même un précieux avantage sur ce sprint de 82 milles, bouclé en 10 heures 40 minutes et 45 secondes par les vainqueurs français !

Au pied du podium, deux autres équipages se sont également qualifiés pour la finale : les Britanniques Maggie Adamson & Cal Finlayson, ainsi que les Canadiens Benjamin Daniel et Sarah Nicholson, auteurs d’une solide performance alors qu’ils n’avaient pu naviguer ensemble que quelques heures - tous deux vivant à quelque 6 500 kilomètres l'un de l'autre, sur les côtes Est et Ouest du Canada !

Malheureusement, la course a également été marquée par la lourde blessure au bras du marin indien Atool Sinha, dont l’équipage a été contraint à l’abandon. Pour assurer leur sécurité, les Néerlandais Tim Lemeer et Lisa Vos ont choisi d’interrompre leur course afin de les accompagner. Une belle leçon d’humilité qui rappelle combien la solidarité entre marins n’est pas un vain mot !

Fatigués mais heureux

Pour les onze autres équipages de la seconde course qualificative, la “Région Bretagne Race”, il aura fallu encore davantage prendre son mal en patience. Reporté de 24 heures en raison de la tempête, le départ a finalement pu être donné à 17 h vendredi 27 septembre, sur un parcours de 87 milles qui a conduit les marins à plonger cette fois vers le Sud, découvrant de nuit les contours déchiquetés de la bien nommée Belle-Île.

En tête dès les premiers milles de course, l’équipage français, composé de Elodie Bonafous et Basile Bourgnon, n’a laissé aucune chance à la concurrence, imprimant un rythme d’enfer à la flotte. Fatigués mais heureux, les deux comparses tricolores sont arrivés victorieux samedi aux premières lueurs du jour, après 14 heures, 14 minutes et 22 secondes en mer !

Trois quart d’heures plus tard, c’est le binôme suédois composé de Anna Drougge et Martin Angsell qui a signé une belle deuxième place, deux minutes seulement devant les néerlandais Erik Van Vuuren et Yvonne Beusker, dont la fatigue a vite laissé la place aux sourires de satisfaction d’être venus à bout de ces rudes conditions météorologiques !

Également qualifiés pour la finale, les Allemands Lina Rixgens et Sverre Reinke se sont emparés de la quatrième place au terme d’une course « courte mais extrêmement fatigante. » Enfin, le dernier sésame a été remporté par les marins turcs Onur Tok et Pelin Keskin, classés cinquième à deux minutes seulement devant l’équipage belge, qui échoue aux portes de la finale…

« Une fierté pour Lorient »

Qui l’emportera au terme de ce nouvel affrontement ? « Ce qui est sûr c’est que le niveau sera exceptionnel, puisque ce sont les meilleurs marins que nous avons la chance d’accueillir cette semaine à Lorient », s’était réjoui lors de la cérémonie d’ouverture le vice-président de Lorient Agglomération, Patrice Valton.

Il faudra en tous cas à nouveau patienter un peu, puisque là encore, la météo joue les trouble-fêtes, et délivre un joli casse-tête pour la direction de course, qui a finalement décidé de reporter le départ de la “Lorient Agglomération Race” à lundi 30 septembre, 11 heures. Un petit répit qui ne sera pas de trop pour les vingt marins encore en compétition, dont les organismes ont été mis à rude épreuve par cette première épreuve.

« C’est un vrai bonheur et une fierté pour Lorient d’accueillir ces vingt-deux équipages, malgré la météo intense », s’est réjoui Jean-Philippe Cau, président de Lorient Grand Large, qui a tenu à remercier tout particulièrement Lorient Agglomération, le département du Morbihan et la région Bretagne pour leur soutien dans la tenue de cet événement, et plus généralement leur rôle, depuis vingt-cinq ans, dans l’émergence de Lorient La Base comme pôle majeur de la course au large mondial. « Vous êtes dans le lieu où il faut être pour la course au large, profitez-en ! », avait ajouté le responsable à des marins ravis de découvrir ce port de légende, que beaucoup ne connaissaient que de nom.

Ils ont dit :
Charlotte Yven et Loïs Berrehar (France 1) : « Nous avons eu 32 nœuds de vent et une vitesse de pointe de 19 nœuds ! Notre premier objectif était de nous familiariser avec le bateau et nos concurrents. Comme toujours, on a essayé de se préparer au mieux, comprendre les conditions météorologiques, et trouver le moyen de rendre le bateau plus rapide en étudiant les différents réglages et modes. Cette course a été une très bonne préparation pour la finale ! »

Djemila Tassin et Jonas Gerckens (Belgique 1) : « Notre objectif au départ était simple : faire partie des cinq premiers, donc nous sommes contents. C'est dommage que nous ayons eu un petit problème de spi, mais c'était bien de s'aligner contre Charlotte et Lois, l'une des équipes favorites pour ce championnat du monde. Notre vitesse par rapport à eux était bonne, c’est prometteur pour la finale ! »

Elodie Bonafous et Basile Bourgnon (France 2) : « Nous n'avons pas fait une course parfaite mais nous sommes heureux d'avoir gagné la Région Bretagne race. Notre vitesse était bonne mais pour avoir une chance de gagner la finale, il ne faudra pas faire d'erreur. Comme en Figaro, la sanction est immédiate. »

Lina Rixgens et Sverre Reinke (Allemagne) : « Le parcours était difficile, la mer était grosse et il faisait très sombre, il était donc difficile de voir le chemin à travers les vagues. Nous changions de barreur toutes les quinze minutes pour rester concentrés. La course a été courte mais elle a été extrêmement fatigante. Nous avons tout donné pour entrer dans le top 5 et nous attendons avec impatience la Lorient Agglomeration race ! »

Source : LGL