Victor Le Pape, vainqueur bizuth (après l'exclusion de Benoit Tuduri) de la Solitaire, "je suis très heureux de cette victoire !" - ITW

 

Le dénouement de la Solitaire du Figaro Paprec a eu lieu il y a 6 jours. Une fin de course chahutée par la révélation, par les arbitres de la FFVoile, de deux cas de triche. Ces actes graves ont mené à l’exclusion de la course de deux skippers et ont eu pour conséquence des modifications notoires pour les classements d’étape et surtout pour le classement général. Certains coureurs, reclassés après ces révélations, ont été privés des moments de célébration pour leurs performances réelles. Tom Dolan n’a ainsi pu profiter de sa victoire, chez lui, en Irlande lors de l’arrivée à Kinsale tout comme Jules Delpech finalement déclaré vainqueur de la troisième étape à Piriac-sur-Mer. Et du côté du Team Région Bretagne – CMB, c’est Victor Le Pape qui n’a pas pu fêter comme il se doit sa victoire au classement Bizuth. 

Crédit : A Courcoux


Le Concarnois de 25 ans a appris quelques minutes seulement avant la cérémonie de clôture qu’il s’imposait finalement sur ce classement rassemblant l’ensemble des marins s’attaquant pour la première fois à ce monstre qu’est la Solitaire du Figaro Paprec. Rendons donc à Victor Le Pape cette si belle victoire qui va même au-delà de l’objectif qu’il s’était fixé. Le skipper du Figaro Espoir réalise pour son entrée sur le circuit Figaro Bénéteau une performance remarquable en terminant respectivement 22ᵉ, 9ᵉ et 20ᵉ des trois étapes. Il termine 9ᵉ du classement général.

Comment as-tu vécu cette première Solitaire du Figaro Paprec ?

­ Je crois que je l'ai plutôt bien vécue. Quand tu as envie d’y retourner alors que ça vient à peine de se terminer, c’est que tu as apprécié la course. J’ai déjà envie de me remettre au travail pour faire encore mieux l’année prochaine. J’ai pris beaucoup de plaisir sur les deux premières étapes. Cela a été beaucoup plus difficile sur la dernière. Je suis allé au bout de moi-même. Mais sur l’ensemble de la course, j’ai connu des moments hyper forts.

­ Quel a été le moment le plus intense pour toi ?

­ Le moment le plus fort, ça a été ce classement de 15 heures lors de l’étape retour de Kinsale. La veille, j’étais 29e à 40 milles du leader et le lendemain (le mercredi 6 septembre, ndr), j’étais revenu à la 10e place à 2 milles de Gaston. Là tout à coup, tu y crois, tu te dis que ça va finir par venir, que tu peux aller chercher quelque chose de bien. La Solitaire du Figaro, c’est vraiment un ascenseur émotionnel permanent.

Tu savais que cette course te ferait passer par tous les états ?

Oui, je m’attendais à vivre ça mais c’est au-delà de ce que j’avais imaginé. Avant de partir à Caen pour le départ, j’avais bu un café avec mon frère Martin. Il m’avait prévenu en me disant « Il faut que tu arrives à lisser tes émotions au maximum ». C’est une phrase que j’ai écrite dans mon bateau d’ailleurs. Mais je ne m’attendais pas à ressentir des hauts aussi forts et à descendre aussi bas. Dans la 2e étape, je me suis persuadé que j’allais revenir et faire un bon truc. Cela m’a boosté. Par contre, lors de la dernière étape, je suis descendu très bas. J’ai vraiment galéré mentalement pendant 4 jours. Sincèrement, je ne m’attendais pas à vivre des choses comme ça émotionnellement. Mais c’est vraiment toute la magie de cette course.

Que referais-tu différemment pour mieux vivre cette troisième étape par exemple ?

Sur la troisième étape, je suis parti détendu. Dans ma tête, j’avais le sentiment de n’avoir qu’une dernière étape à faire et après c’était fini. Mais en fait, j’aurais dû la prendre comme les autres. J’ai changé des choses dans mon avitaillement, dans mes routines … Je n’aurais pas dû le faire. Résultat : avec la fatigue accumulée sur la première étape et les émotions sur la deuxième, j’ai beaucoup beaucoup souffert sur la troisième. Je suis allé au bout de moi-même.


Quels objectifs t’étais-tu fixés ?

J’avais dit que si je faisais un top 15, je serais content. Dans le cas d’un top 10, que ce serait une super performance. L’objectif de gagner le classement bizuth était au fond de moi. Mais je mettais certains skippers en haut de la pile comme Hugo Dhallenne. Il est très expérimenté au large et a fait un super début de saison. Nous avons passé de longs moments côte à côte sur la première étape, on ne savait pas qu’on allait finir loin au classement tous les deux. À partir de là, je me suis dit que finalement tout était possible et que chaque mètre allait compter pour remporter ce classement bizuth. Quand j’ai appris le classement à l’issue de la première, je me suis dit qu’on était sur une autre course. Sur la Solitaire, tu joues des effets qui s’étirent sur 50 milles contrairement aux formats de course plus courts d’avant-saison.

Et cette victoire sur le classement Bizuth ?

La façon dont je l’ai apprise a été particulière. J’ai d’abord entendu des rumeurs sur des soupçons de fraude. Je ne voulais pas y croire jusqu’à ce que tombe la décision de jury ! À ce moment-là, je suis passé par des sentiments différents. J’ai été surpris, déçu. Ça m’a fait mal pour mon sport d’abord. Au début, je me suis dit que j’avais gagné parce que des mecs avaient été disqualifiés. Et en fait, rapidement, j’ai compris que j’avais gagné parce qu’ils n’ont pas joué avec les mêmes règles que nous. Moi je suis quelqu’un d’hyper honnête, j’ai joué avec les règles établies. Donc ma victoire est normale. Mais sur scène lors de la cérémonie, j’avais du mal à lever les bras, j’étais dans un état d’esprit étrange. Je voulais être assez discret et ce sont les autres skippers qui m’ont dit de profiter de cette victoire parce que c’était la mienne et que je ne l’avais pas volée. J’ai essayé de profiter du moment mais ce n’était pas facile. On m’a donné cette info juste avant la remise des prix. J’aurais évidemment préféré le savoir dès l’arrivée au ponton, j’aurais vécu le moment différemment. Mais je suis très heureux de cette victoire !

Source : Effets Mer