Nous avions quitté hier soir les 32 figaristes alors qu’ils arrivaient sur la marque Desormes au nord de Jersey après une interminable partie de rodéo au près. La suite de la nuit fut presque “confortable” : les skippers ont pu ouvrir les voiles et dévorer les milles sur un seul bord jusqu’au phare d’Eddystone avant d’empanner et de repartir, au portant et toujours sur un seul bord, en direction des côtes bretonnes. Avec près de 200 milles nautiques parcourus en moins de 12 heures, des moyennes de vitesse avoisinant les 16 nœuds, la flotte n’a pas traîné sur cette portion du parcours. La fin de l’étape s’annonce d’ores et déjà plus scabreuse…
Tom Laperche (Bretagne CMB Performance), passé en tête sur les dernières marques de parcours, a réussi à placer un petit coup d'accélérateur tout en contenant les assauts de ses poursuivants. Pour autant, la menace gronde : Guillaume Pirouelle (Région Normandie), Loïs Berrehar (Skipper MACIF 2022) et Achille Nebout (Amarris- Primeo Energie) sont collés au tableau arrière du trinitain, l'obligeant à une vigilance maximale. À ce stade de la course et après deux éprouvantes journées, sera sans nul doute l’un des facteurs clés de cette fin d’étape. Ce matin, à bord d’Addictive Sailing, bateau accompagnateur, le directeur de course, Yann Chateau, confirmait que les corps avaient beaucoup souffert et que les marins commençaient à être “cramés”. Sous spi depuis hier soir dans des conditions soutenues de vent et de mer (encore 20 à 25 nœuds de Nord-Est ce matin et 2 mètres de creux), l’enjeu majeur était d’éviter la sortie de route, le départ au lof ou à l’abattée qui, en plus de constituer un risque de casse matérielle, fait perdre au coureur beaucoup d'énergie et de précieuses minutes. Après ses heures harassantes à régler leurs spis, il va pourtant falloir trouver suffisamment d’énergie pour attaquer la dernière partie de l’étape.
Heureusement pour tous, le vent a commencé à mollir au large d’Ouessant (5 à 10 nœuds de secteur Est). Une bien maigre consolation lorsqu’on sait que c’est justement dans le petit temps qu’on peut créer la différence en restant attentif au moindre souffle d’air. Sur la descente le long des côtes bretonnes, il peut aussi y avoir des coups à jouer avec un possible regroupement à hauteur du Raz-de-Sein à la faveur d’un courant contraire. Enfin, il faudra tâcher de ne pas se faire piéger ou d’exploiter au mieux les vents instables en force et en direction annoncés pour la nuit, choisir de rester à la côte pour tenter de jouer avec les thermiques ou partir au large pour bénéficier du synoptique.
Qui aura gardé suffisamment de fraîcheur pour rester lucide et tirer le meilleur parti de cette fin de course ? On devrait entrevoir un début de réponse dès demain, mercredi, dernière journée de course avant une arrivée prévue à Royan, jeudi, au petit matin.
Erwan Le Draoulec (Skipper Macif 2020) : "dans le bon paquet, pas loin de la tête de flotte"
“ Là, ça glisse bien au large d’Ouessant. Je passe assez proche pour jouer avec le courant. C’est un endroit toujours sympa. En plus il fait beau, il y a encore du vent, c’est chouette ! Hier, je me suis arrêté un moment à cause d’un filet pris dans ma quille. Décidément, je galère sur les débuts d’étape avec des trucs comme ça. Mais j’ai eu une super vitesse au près hier ; et j’ai bien attaqué au portant cette nuit, même si certains allaient un peu plus vite que moi devant. Quand on attaque comme ça, il y a de l’adrénaline assez forte. Même si on ne peut pas trop dormir, pas trop manger, on a des super sensations de glisse à bord de ces petits bateaux. Je suis plutôt content d’être dans le bon paquet, pas loin de la tête de flotte pour la suite qui s’annonce complètement différente, mais tout aussi intéressante. Je garde le moral, même si ma Solitaire, je la voyais plus simple, avec moins de galères qui font que j’ai du mal à faire des bons débuts de course. Mais je n’y peux pas grand chose ; il faut faire avec. La première étape nous a prouvé que rien n’est joué jusqu’au bout. Là, on va voir comment le vent se casse la figure. Il faudra choisir son côté à l’Occidentale de Sein, en espérant pouvoir y aller et l’enrouler avant que ça s’arrête complètement. Après, soit ce sera une route le long des côtes pour avoir des petits effets thermiques et compagnie, soit rester au large avec le vent synoptique. Voilà, choix draconien ! Je vais regarder ce que font les premiers à l’AIS (Automatic Identification System), même si aller à terre me tente un peu. Mais je ne vais pas y aller tout seul.. Quoi que ? Je suis en pleine réflexion. Il me reste trois heures pour cogiter…”Ordre de passage à la Cardinale Chaussée de Sein :
1 - Tom Laperche - Bretagne CMB Performance à 15:142 - Guillaume Pirouelle - Région Normandie à 15:15
3 - Loïs Berrehar - Skipper MACIF 2022 à 15:28
Source : C Concetti
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