Ce jeudi midi, au terme d’un convoyage retour et cinq jours après une victoire qui lui a été signifiée alors qu’il s’était abrité au mouillage dans un fjord islandais, Charlie Dalin a franchi en grand vainqueur le chenal des Sables d’Olonne. Accueilli par le public toujours présent pour saluer les solitaires, il récolte les fruits de sa navigation précise et inspirée qui lui a permis de franchir en premier la porte dans le Sud-Est de l’île aux volcans. Et de s’imposer sur cette Vendée Arctique 2022.
Une victoire en Islande
« Aujourd’hui, je commence tout juste à réaliser que j’ai remporté la course, ce dont je ne me suis pas trop rendu compte quand j’ai franchi la porte islandaise, qui est devenue 24 heures plus tard la ligne d’arrivée. On n’a pas eu le rituel classique des arrivées : un bateau comité, les retrouvailles avec mon équipe, mon partenaire, ma famille… J’ai appris cette victoire par un message. Tout ça était très insolite. Je l’ai fêtée seul au mouillage, bien calfeutré à l’intérieur du bateau avec une fondue, l’un des plats les plus riches que j’avais embarqués pour les quelques jours de course les plus froids. Et j’ai fait quelques images de drone de cet environnement hostile et dépaysant avec ses montagnes aux sommets enneigés. Avec Thomas Ruyant, avec lequel j’ai pu un peu discuter à la VHF, on a passé 48 heures au mouillage, à l’abri dans un fjord islandais. On a eu des belles rafales à 45 nœuds. Mais au bout du compte, je suis plutôt content d’être passé entre les gouttes du plus dur de la dépression qu’ont subi les autres en mer. Avec l’équipe, en planifiant tout, on essaye de laisser le moins de place possible à l’aventure qui finit parfois sur ce type de course par nous rattraper… Mais avant d’en arriver là, on a eu une belle bagarre avec Thomas et Jérémie (Beyou) ; et je suis content d’avoir tiré mon épingle du jeu. »
Les secrets de la performance ?
« J’ai bien tiré sur le bateau. Après le départ, dans des conditions vraiment favorables, j’ai tenu des très bonnes moyennes, à 28 nœuds sur plusieurs heures. Si cela avait duré, il y avait vraiment moyen de pulvériser le record de vitesse sur 24 heures en IMOCA et monocoque toutes catégories. Lors de la première dorsale anticyclonique, j’ai réussi à bien gérer en me décalant à l’Ouest. À la sortie, j’ai pu toucher le vent frais en premier. Et lors du passage de la deuxième zone de transition, j’ai profité que ça parte par devant pour creuser avant que cela se resserre un peu en approche de l’Islande. Cette course offre un petit cran de difficulté supplémentaire par rapport à une transat classique. Sur ce parcours, on est à la merci de toutes les conditions possibles et imaginables qui nous obligent à nous adapter. Sous les latitudes Nord, les systèmes évoluent vite, les prévisions sont moins bonnes, il faut plus réfléchir et interpréter les fichiers pour décider de sa trajectoire. Au final, je suis vraiment satisfait de la façon selon laquelle j’ai navigué, en limitant les changements de voiles, en m’économisant. Et du duo que je forme avecle bateau. Aujourd’hui, je le connais par cœur, j’arrive à pousser les rapports de vitesse et à naviguer à haut régime plus naturellement, presque instinctivement. Je fais corps avec lui. J’ai des repères bien identifiés qui me laissent plus d’amplitude pour travailler ma stratégie. »
La suite ?
« Avec toute l’équipe, on va d’abord faire un bilan à mi-saison en déterminant quels axes méritent d’être consolidés et les modifications nécessaires à apporter sur le bateau. Il reste toujours une marge de progression. Les autres équipes en font de même. Elles ne vont pas nous attendre, il faut toujours se remettre en question. Après une série de navigations de relations publiques avec des invités, le bateau va rentrer le 12 juillet en chantier, pour un petit mois. Il s’en suivra 4-5 stages d’entraînement avec le pôle d’entraînement Finistère Course au Large et les 48 heures du Défi Azimut. Dès la mi-août, le rythme va repartir sur les chapeaux de roue avec un belle montée en puissance dans la préparation pour arriver le plus affûté possible au départ de la Route du Rhum. Cette transat reste l’objectif majeur de cette saison. Je suis content de cette victoire sur la Vendée Arctique à double titre : pour la course en elle-même sur un parcours difficile sur le plan sportif et maritime, mais aussi pour le tronçon au portant dans du vent fort qu’elle nous a offert, dans des conditions qu’on sera susceptible de rencontrer à l’automne prochain entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre. Cela m’a permis de vraiment travailler les réglages, et de prendre des notes dans ma tête. Il reste à décortiquer et analyser cette performance qui reste très bonne à prendre pour la suite… »Source : Apivia