Avec une participation record de 24 skippers, dont 21 étaient déjà présents sur les IMOCA GLOBE SERIES 2021, cette épreuve d’ouverture de la saison 2022 fut une nouvelle démonstration de la superbe santé de l’IMOCA. Cette confrontation ouvre le bal d'une année exigeante rythmée, entre autres, par deux grandes courses en solitaire (3 500 milles chacune) : la Vendée Arctique (12 juin) et la Route du Rhum-Destination Guadeloupe (6 novembre).
La Guyader Bermudes 1000 Race fut emportée par l'infatigable Charlie Dalin (APIVIA), suivi de son rival de longue date, Jérémie Beyou (Charal) qui arriva plus d'une demi-journée plus tard. Le troisième joueur de ce trio aurait dû être Thomas Ruyant (LinkedOut), mais la rupture d’une pièce dans son système de barre l’a contraint à l'abandon.
Quatre comme les trois mousquetaires
Nul n’est surpris de voir ces trois marins dominer cette course de 1 200 milles sur des bateaux tous éprouvés, compétitifs et optimisés au maximum. Désormais, la grande question est de savoir comment se déroulera la transition de ces campagnes à l’arrivée de leurs nouveaux IMOCA. Jérémie sera le premier à mettre son nouveau plan Manuard à l’eau, à temps pour la Route du Rhum-destination Guadeloupe à la fin de l’année. Charlie et Thomas devront eux attendre le début de l’année 2023 pour prendre en main leur nouvelle machine.Derrière eux, la compétition a fait rage. Avec un départ donné dans des vents légers, puis un passage de Fastnet et du Cap Finisterre dans une brise soutenue, les concurrents n’ont rien lâché et même relevé un premier défi éprouvant pour les skippers de bateaux nouvellement acquis. Louis Burton s’est emparé de la troisième marche du podium à bord de son Bureau Vallée (ex-L’Occitane en Provence) ; qui avait malheureusement démâté sur la Transat Jacques Vabre 2021.
Lunven, Joschke et Dutreux très en forme !
Nicolas Lunven franchit, lui, la ligne d'arrivée à Brest en quatrième position, moins d'une heure après Louis Burton. ‘Nico’ naviguait à bord de Banque Populaire (ex-Groupe APICIL) loué par l’écurie pour les premières courses de la saison 2022. Nicolas Lunven, skipper remplaçant de Clarisse Crémer, n’était pas attendu dans les quatre premiers de la course étant donné l’âge de son bateau, un plan Finot-Conq de 2008. Le skipper vannetais, vainqueur de la Solitaire du Figaro en 2009, n’avait de plus jamais couru en solitaire en IMOCA et n’avait pas navigué seul depuis cinq ans. Il réalise donc une performance exceptionnelle en se plaçant à la porte du podium.Après un très bon départ à quelques longueurs seulement de Charlie Dalin, Nicolas Lunven s’installe dans le top 5 dès les premières heures de course et il ne le quittera pas, notamment grâce à de très bons choix stratégiques. A l'arrivée, il devance Isabelle Joschke qui réalise aussi une course magnifique en terminant cinquième sur MACSF et Benjamin Dutreux, sixième pour sa toute première course avec son nouveau Guyot Environnement-Water Family (ex-11th Hour Racing Team-Alaka’i).
A son arrivée sur les pontons du port de Brest, Nicolas Lunven mettait en avant ce qu'il lui reste à apprendre. "Il est important de savoir où placer le curseur en termes de prise de risque, de performance et d'engagement", déclarait-il. "C'est un point sur lequel j'ai beaucoup appris et c’est un processus d'apprentissage qu’il faut faire sur moi, mais aussi sur le bateau car chaque IMOCA est différent. Sur cette course, j'ai un peu tâtonné, donc j'espère avoir progressé sur ce point. Après, c'était intéressant de jouer sur l'eau car il y avait des plein de coups stratégiques à faire. Je ne me suis pas ennuyé !"
Découvertes et re-découvertes
A la dixième place, le skipper Néo-Zélando-Américains Conrad Colman a fait un travail impressionnant sur Imagine (ex-VandB-Mayenne) pour son retour en IMOCA depuis son Vendée Globe en 2016-17. Il termine troisième bateau à foils droits, derrière Eric Bellion, septième sur COMMEUNSEULHOMME powered by Altavia.Vient ensuite Benjamin Ferré, marin et aventurier breton de 31 ans qui débute sa campagne en vue du prochain Vendée Globe et s’empare, pour sa première course, de la onzième place à bord de l’ex-Banque Populaire X (celui de Clarisse Crémer sur le dernier Vendée Globe), une très belle réussite.
Le jeune Français, troisième de la Mini Transat en 2019, était toujours dans le coup et s’est même placé jusqu’à la septième place quelques milles avant la ligne d’arrivée, avant de finalement terminer onzième. "Je voulais finir la course pour moi et je voulais aussi bien faire parce qu'il y a beaucoup de gens qui me font confiance depuis six mois, notamment Jean le Cam et toute son équipe, Gildas Mahé, Pierre Brasseur et les sponsors", déclarait-il à l’arrivée. "Cette première course m’a donné envie de trouver plus de manettes car même si je ne connais pas encore bien le bateau, je vois bien le potentiel qu’il a. J'ai essayé de faire du mieux que je pouvais, de tester des choses. J'ai essayé de le pousser à la limite et de le ramener à la maison".
Guirec Soudée, nouveau venu issu du monde de l’aventure, a jeté son dévolu sur le Vendée Globe après une carrière remarquable d'explorateur au large, à la voile puis à la rame. Pour ses débuts en IMOCA sur Freelance.com (ex-OMIA-Water Family), il a fait ses preuves en terminant seizième, à un peu plus d'une heure du Suisse Alan Roura sur Hublot (ex-Hugo Boss).
A son retour à Brest dans la nuit de samedi à dimanche, Guirec a été d'une grande honnêteté sur sa course qui était pour lui une grande première. "Il y avait des moments où le bateau fonctionnait vraiment bien et j'étais même assez surpris de me retrouver côte à côte avec des marins qui ont beaucoup d'expérience", racontait-il. "Et puis il y avait d'autres moments où je faisais d'autres réglages, mais je n'avais pas l'impression que ça marchait et je ne comprenais pas pourquoi. Je n'ai pas encore toutes les clés - l'objectif principal était de terminer cette course.” Tout comme Benjamin, les débuts du marin sont prometteurs et on ne peut que s'attendre à des choses encore meilleures de la part des deux hommes sur les courses à venir.
Hare, un peu déçue
Aux côtés de Alan Roura, la Britannique Pip Hare commençait elle aussi son apprentissage en course sur son foiler Medallia (ex-Bureau Vallée 2). Après un départ mitigé dans des vents légers, Pip Hare a tout fait pour rattraper son retard et s'est classée jusqu'à la treizième place. Elle termine finalement 17ème, après avoir subi une pénalité de 90 minutes pour avoir accidentellement brisé un plomb moteur."Cela n'a pas été ma meilleure course", admettait Pip, déçue, alors qu’elle visait un top 10 sur cette course. “Le début dans le petit temps était très compliqué, puis lorsque le vent s’est renforcé, le bateau allait vraiment bien, mais à un moment donné, j'ai été projeté en arrière. Je me suis alors ouvert la tête et mon dos était couvert de bleus.” Comme les coups qu'elle a reçus, elle décrit cette pénalité comme "douloureuse".
Comme beaucoup de skippers présents sur la Guyader Bermudes 1000 Race, Pip Hare fera tout pour sortir du lot sur la deuxième course de la saison, La Vendée Arctique (3 500 milles) qui partira des Sables d'Olonne le 12 juin prochain.
Source : IMOCA