Armel Le Cléac'h (Banque Populaire) et François Gabart (MACIF) risquent de se voir prochainement confronter à une zone de calmes qui va les obliger à prendre des options de route plus tranchées. Va-t-on vers une séparation des trajectoires ? Derrière, Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec 3) et Alex Thomson (Hugo Boss) ont été freinés dans la nuit alors que Jean Le Cam (SynerCiel) devrait encore accélérer aujourd'hui. Bernard Stamm est enfin à l'abri et s'attelle à réparer.
Credit : Sophie Luther
Au matin de ce 26 décembre, c'est Armel Le Cléac'h (Banque Populaire) qui mène toujours la danse dans la valse des positions qu'il échange avec François Gabart (MACIF) depuis le début du mois de décembre. Si les deux jeunes marins ont affiché de très belles moyennes tout au long de la nuit, avec des vitesses rarement inférieures à 19 nœuds, c'est le skipper de Banque Populaire qui s'est montré le plus rapide avec 445 milles parcourus ces dernières 24 h. Il distance François Gabart d'un peu moins de 10 milles.
Décalé de 25 milles dans son nord, le skipper de MACIF a peut-être commencé à incurver sa route en prévision d'une zone de vents plus faibles annoncée par les fichiers météorologiques la nuit prochaine. Installés dans un flux de sud-ouest de 20/25 nœuds, les deux marins devraient être confrontés à l'incursion d'une petite bulle anticyclonique arrivant par le sud, sur la route qui les emmène directement vers la porte Pacifique Est. Il faudra alors faire le choix de contourner la difficulté par le nord pour garder du vent frais ou de tailler tout droit au plus court au risque de se voir fortement freiné...Armel a déjà montré sa préférence pour les trajectoires plus tendues mais plus risquées pendant que François Gabart semble privilégier la vitesse, quitte à rallonger la route...Bref, nous pourrions assister ici à une petite divergence d'options qui séparerait sensiblement les deux leaders...
Fort ralentissement pour JP Dick
Très rapide hier, Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec 3) était bien remonté sur la tête de flotte. Il vient cependant de reperdre 100 milles dans la nuit. Il avance péniblement dans un vent d'ouest de 10 nœuds qui va basculer progressivement au nord-ouest et monter jusqu'à 20 nœuds, lui permettant de faire route directe à bonne vitesse vers la porte Pacifique Est. Moins ralenti pendant la même période, Alex Thomson (Hugo Boss) est malgré tout repassé au-dessus de la barre des 1000 milles (1059) de retard sur les leaders, à 600 milles de la porte Pacifique Est. Un empannage cette nuit à une heure du matin lui permet de faire maintenant route directe vers ce prochain point de passage obligé, dans un flux d'ouest d'une quinzaine de nœuds qui va basculer au nord-ouest et monter à 30 nœuds, poussant la magnifique étrave chromée dans une mer forte, mais relativement ordonnée.
Accélération prévue pour Jean Le Cam
Jean Le Cam (SynerCiel) fait cap au sud-est pour aller récupérer la dépression qui arrive dans son sud. Au programme de cette zone de basse pression, 35 nœuds d'ouest et 6 mètres de creux ! De quoi dévaler les pentes du Pacifique à grande vitesse pour celui qui à pas mal souffert d'une mer hachée et vicieuse la nuit dernière.
Mike Golding (Gamesa) et Dominique Wavre (Mirabaud) sont tous les deux revenus un peu sur Jean Le Cam dans la nuit, même s'ils restent un peu plus de 400 milles de son tableau arrière. Ils devraient cependant voir leur progression prochainement ralentie. Actuellement poussés par un bon nord-ouest de 25 nœuds et une houle de près de 5 mètres, ils vont voir le vent tourner à l'ouest et faiblir à 15 nœuds, pendant que le skipper de SynerCiel accrochera une nouvelle dépression...200 milles dans leur sillage mais également 100 milles plus au sud, Javier Sanso (Acciona 100 % EcoPowered) cherche également à accrocher une zone de basses pressions dans son nord-ouest, qui pourrait lui permettre de combler une partie de son retard sur le groupe, grâce à un mouvement de cuillère par le sud.
Bernard Stamm est arrivé à Dunedin
C'est la nuit dernière, entre 2h30 et 3 heures (heure française) que Bernard est arrivé à Dunedin, mouillant plus exactement dans la baie de Kaikai à la grande surprise des habitants de la région néo-zélandaise (il était 3 heures de l'après-midi de l'autre côté du globe). Une arrivée relayée largement par la télévision et les médias locaux. Une "animation" appréciée par les familles présentes en nombre sur la plage en ce Boxing Day, jour férié et Ô combien populaire en Nouvelle-Zélande.
Soucis de rail de grand-voile pour Javier Sanso. Il raconte
"Le chariot de la drisse de grand voile s’est de nouveau cassé, mais pas au même endroit que la première fois. Ce matin, quand j’ai pris un ris, le chariot était coincé : j’ai réussi à le faire descendre mais une pièce est restée dans le rail, à environ 27 mètres du pont. Demain j’essaierai de grimper à nouveau au mât. Théoriquement, ça devrait être plus simple que la dernière fois, car le bateau sera stable et ne fera pas d’embardées. J’espère pouvoir réparer et continuer avec la grand voile entière, autrement je devrai continuer avec un seul ris jusqu’à la fin."
Les marins racontent
Armel Le Cléac'h :
" C'est l'heure des choix. On a une zone de transition devant puis on va passer la porte. Je n'ai pas l'impression d'avoir une route très différente de François (Gabart) mais on a chacun nos routages "
JP Dick :
"Il y a 4,8 nœuds de vent, il n’y a pas d’air, c’est de la folie. En revanche, il y a toujours des vagues. C’est incroyable dans les mers du Sud, même quand il n’y a pas de vent, la grande houle reste. Les phénomènes ondulatoires sont importants ici, ce n’est pas comme en Méditerranée. Le bateau tape même dans le vent faible. Le vent devrait rentrer dans quelques heures."
Jean Le Cam :
"Pour moi, le passage important du tour du monde c’est quand tu passes ce fameux antiméridien. Jusque-là, ta position augmentait dans l’Est et là, arrivé à 180°, le décompte s’inverse, un peu comme un compte à rebours. Tu as fait la moitié de la terre et plus ça va plus tu te rapproches de la latitude de l’Europe. Les Sables d’Olonne sont à 2°Ouest et le Cap Horn est à 67°Ouest. Il ne me reste plus que 113° pour le Horn et ça fait plaisir. Ce n’est plus beaucoup en comparaison de tout ce que l’on a fait."
Mike Golding :
"Il y a un risque très important de regroupement dans l'Atlantique. Si les leaders passent le Cap Horn avec un vent de face et que nous arrivons avec un vent d'Ouest, ça peut être intéressant. J'ai vraiment l'impression que je m'habitue tout juste à la vie dans le Sud et il semble que nous allons déjà en sortir bientôt, et faire route vers le Nord. Mais bon, cela dit, j'ai vraiment hâte d'être au Cap Horn."
Arnaud Boissières :
"Ciel gris, vent, vagues, c'est que du bonheur ! Une belle allure pour avancer vite. Il y a une dépression qui me rattrape. Je peux avoir un bon coup à jouer pour réduire l'écart avec devant. "
Bertrand de Broc :
" Les conditions le soir de Noël étaient très agréables. C'est bien car sinon la plupart du temps, c'est difficile. Aujourd'hui, la mer n'est pas très belle, ce n'est pas simple. Le temps est mitigé. La météo va être calme pendant 3 jours "
Classement à 12 h
1 Banque Populaire Armel Le Cléac´h
2 MACIF François Gabart à 11.2 nm
3 Virbac Paprec 3 Jean-Pierre Dick à 663.9 nm
4 HUGO BOSS Alex Thomson à 1078.1 nm
5 SynerCiel Jean Le Cam à 1958.2 nm
Sources : Vendée Globe / Poujoulat