En pointe, François Gabart (MACIF) et Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) ne lâchent rien dans le duel qu’ils se livrent depuis 48 heures. Dans ce combat singulier à vue, leur seule arme est la vitesse. Mais pourront-ils résister longtemps à cette guerre des nerfs, alors que la flotte n’a pas encore atteint la mi-parcours ?
François Gabart :"Quand on revient à 18, 19 nœuds, on n’a pas l’impression d’aller très vite"
"Le bateau glisse à toute vitesse sans forcer et dans de bonnes conditions. C’est super agréable de vivre ça. Je ne dis pas que la course est facile, loin de là. Rien n’est facile. Le Vendée Globe est l’une des courses les plus difficiles au monde. On en bave, on a des problèmes, mais il y a aussi des moments sympas comme lors de ces deux derniers jours. Les conditions qu’on a eues au niveau de la porte Crozet ont été difficiles, le vent a beaucoup tourné. Je ne sais plus combien de changements de voiles j’ai fait en 24 heures mais on a beaucoup manœuvré et j’étais crevé. Il y a 25 nœuds de vent à peu près, la mer se forme mais c’est assez raisonnable. Ce n’est pas violent comme ça a pu l’être. Si on va à plus de 20 nœuds pendant plusieurs jours, quand on revient à 18, 19 nœuds, on n’a pas l’impression d’aller très vite."
Jean Le Cam :" j’ai sauté dans mes bottes et dans mon ciré pour éviter le drame."
« C’est la guerre ! J’ai fortement réduit la toile car le vent a soufflé à 35 nœuds cette nuit et avec la grosse houle, on risque des départs à l’abattée. Je n’ai pas compris ce qui arrivait car les fichiers indiquaient 18 nœuds et là, on a plutôt du 30 / 35 nœuds dehors. Je ne m’y attendais pas trop donc je n’avais pas prévu de réduire la toile. Cette nuit, quand le grain est arrivé, j’ai sauté dans mes bottes et dans mon ciré pour éviter le drame. Je préfère sécuriser. Dans ce genre de conditions, il y a tout à perdre et rien à gagner. Forcément, je n’ai pas trop dormi. J’attends que ça passe. D’ici demain, on naviguera dans des conditions bien plus agréables : 20 nœuds de vent de travers. Mais attention quand même à la pétole qui pointe sur la porte d’Amsterdam. Bref, ce Vendée Globe n’a pas fini de nous surprendre ! »
Message de Dominique Wavre :"Comme une trêve après un combat."
"Le soleil se couche dans le sillage du Mirabaud, le vent s’est calmé après ce passage de front plutôt musclé ! Un rayon du soleil couchant pénètre dans mon petit chez moi et réchauffe l’atmosphère, le plastique de la "véranda" est descendu et l’effet de serre fonctionne à merveille. Nous arrivons aux 20 degrés, un exploit ! De petits sommes en petits sommes, les efforts de la nuit passée disparaissent. Je profite d’une certaine sérénité du moment après la bousculade de la dernière nuit, comme une trêve après un combat. L’anticyclone de derrière nous rattrape, tout se calme et s’arrondit, les albatros sont revenus jouer autour de nous. Ils tournent inlassablement autour du Mirabaud, faisant de grands huit qui les amènent toujours sous le vent des voiles, et là, ils ont l'air surpris, décrochent et hop, un petit coup d'ailes, changement de trajectoire et ils repartent dans une accélération planante. Ce spectacle est élégant, majestueux et tellement fascinant ! Quant à Mirabaud, il est de nouveau content de s’exprimer sans aucune retenue."
Alessandro Di Benedetto :" Je suis resté en veille avec beaucoup d’attention"
"Je suis soulagé. Là, ça se passe très bien. Je suis resté en veille avec beaucoup d’attention. La direction de course m’a envoyé un message pour me dire que j’étais dans une zone d’icebergs. J’ai affalé la grand-voile, j’étais toutes les deux-trois minutes à l’extérieur. J’ai navigué à vue avec l’aide du radar. Quand le jour s’est levé, j’ai renvoyé la grand-voile. Les températures avaient pas mal baissé mais là c’est remonté à 10-11 degrés donc ça va mieux maintenant. Le soleil du Vendée Globe, c’est mon énergie. Il y a tout cet engouement, vos mots, mon sponsor… C’est mon soleil du Vendée Globe parce que le vrai soleil n’est plus beaucoup là. Je suis drôlement content du résultat pour le moment. Nous sommes toujours là avec Team Plastique, pour moi c’est un honneur. Je suis content que le bateau soit en parfait état."
Après avoir sorti la caisse à outils il y a quelques jours, Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat), a cette fois ouvert la trousse à pharmacie pour y extirper du matériel dentaire : une de ses molaires s’est cassée alors qu’il mangeait. Il a dû la limer et la combler avec un pansement, les nerfs à vifs. Une opération douloureuse, apparemment réussie, et qui n’a pas empêché le marin suisse de continuer à cravacher dans la brise…
Classement à 16 h
1- Armel Le Cléac'h [ Banque Populaire ] à 15 001.4 milles de l'arrivée
2 - François Gabart [ Macif ] à 1.2 milles du leader
3 - Jean-Pierre Dick [ Virbac Paprec 3 ] à 79.6 milles du leader
4 - Bernard Stamm [ Cheminées Poujoulat ] à 152.5 milles du leader
5 - Alex Thomson [ Hugo Boss ] à 159 milles du leader
*Attention : le skipper de MACIF a été pointé trente minutes avant celui de Banque Populaire. Tout porte à croire qu’en réalité, Gabart est toujours en tête.
Source : Vendée Globe / Synerciel