Vendée Globe / Marc Guillemot : "Je sais pourquoi j’y retourne"

Les galères, Marc Guillemot en a connues en 2008… Jusqu’à se demander s’il lui serait possible de franchir la ligne. Après tous les incidents (assistance de Yann Eliès, gravement blessé  dans le Grand Sud, et la perte de sa quille peu avant l'arrivée aux Sables), qui ponctuèrent sa route durant trois mois, pourquoi remettre cela?

Marc Guillemot nous raconte pourquoi il repart sur le Vendée Globe.
Credit : F.Van Malleghem/DPPI/Safran

A huit jours de l’arrivée aux Sables d’Olonne en 2009, la quille de Safran se fait la malle dans les profondeurs.  Au fil des tâtonnements et de l’expérience, son skipper affine le tir, fait route au but, et conserve sa troisième place! Quelques mois après l’arrivée, tout est devenu clair dans sa tête. Marc Guillemot a justement besoin d’effacer la frustration de ne pas avoir mené son bateau à 100% de ses possibilités. Il est parti dans les favoris mais n’a pu surmonter le handicap provoqué par le sort (assistance à son concurrent Yann Eliès dans l’océan Pacifique), mais aussi à cause des avaries techniques (rail de grand-voile arraché, perte de la quille).

Avec sa longue expérience de coureur au large, Marc Guillemot estime que le Vendée Globe n’est pas forcément la plus belle des compétitions – d’autres formats de course le sont aussi - mais il explique que ces trois mois de haute mer reposent sur trois axes forts qui n’appartiennent qu’à elle seule: «Cette course magique est tout d’abord une véritable aventure. C’est ensuite un engagement sportif de qualité. Enfin, c’est un défi humain qui débute avec la préparation même de l’épreuve.» 

Souvenirs…
Parmi les souvenirs accumulés dans la tête de Marc tout au long du parcours, la perte de la quille représente une drôle d’aventure.  Pour l’assistance de Yann Eliès, alors qu’une vie humaine est en danger, c’est une tout autre histoire. Marc reste à proximité du bateau de Yann gravement blessé au fémur, jusqu’à son évacuation par la Marine australienne trois jours plus tard.

Dans cette course impitoyable, heureusement, les souvenirs peuvent aussi chanter. Le départ et l’arrivée font partie des meilleurs. À cette nuance près : le second moment ne se vit «qu’à la condition bien sûr d’arriver» précise le skipper. Et c’est déjà une victoire! Les paysages, les ciels, la rencontre avec des animaux, les passages symboliques comme celui du Horn - où l’on mesure le moment du retour à la maison font partie de la fête ». Et pourtant, dit Marc «ce même tas de cailloux, nous l’avons aussi en Bretagne…» Mais surtout pour lui, « les grands moments sont ceux, tout simples, où on a le sentiment d’être pleinement en phase avec le bateau. »

En amont
"La meilleure des préparations, c'est naviguer" Le skipper de Safran résume l'essentiel : si pour le Vendée Globe 2008, il s'était astreint à des séances avec une préparatrice physique, pour celui-ci «J’ai un peu délaissé la salle. C’est directement lié au programme d’entraînement que j’ai construit, avec beaucoup de milles courus sur le bateau ».

La nutrition ? « Voilà quatre ans, j'avais travaillé avec un nutritionniste qui m’avait dit en substance : «Surtout ne change rien, c’est très bien comme ça!». Côté psychologique, guère d’inquiétude non plus : «Je connais mes capacités, je sais pourquoi j’y retourne et je sais que je ne ferai pas demi-tour au moindre pépin». Guillemot, c’est du solide.

Un bateau plus fiable en 2012
Quelques mois après l’arrivée du dernier Vendée Globe - d’un commun accord - le skipper, Safran et les architectes font le choix de conserver le bateau de 2008 en le faisant évoluer plutôt que d’en concevoir un
nouveau. De l’avis de Marc Guillemot, dans le cadre de cette course de vitesse mais aussi d’endurance, l’ensemble des améliorations 2012 doit porter sur le «renforcement de la fiabilité sur tous les plans.» Sur la
base d’une carène de référence, qui a fait ses preuves dès 2006, à sa conception, et représenté un modèle pour ses concurrents, les masses concernant en particulier le lest et le mât vont être mieux réparties. Le voile de la quille pendulaire, portant le bulbe en plomb à son extrémité, est réalisé en titane au lieu du carbone utilisé auparavant.

Le mât, étudié par l’architecte Guillaume Verdier qui a eu accès aux moyens de calculs dynamiques des ingénieurs de Safran, est plus léger. Ce gain de poids a permis d’améliorer le couple de redressement en abaissant son centre de gravité. Le rail de grand voile en tissé 3D a surtout permis sa parfaite intégration à l’espar, et le coefficient de fiabilité est supérieur à celui qui était rapporté en aluminium.

Parmi la somme des petites innovations, la centrale inertielle,conçue également par Safran, optimise encore la marche du bateau. Interfacée avec la centrale électronique, elle offre une grande précision d’utilisation. Elle donne le vrai nord sur l’ensemble de la planète ainsi que les attitudes du bateau, et peut être couplée plus efficacement avec le pilote automatique. Ce véritable «équipier» des solitaires qui tient le cap 24 heures sur 24, est ainsi plus vif, réactif et performant.

Côté «nav», c’est surtout le nombre de satellites lancés en plus grand nombre dans l’espace qui a modifié la donne depuis quatre ans. Et les serveurs embarqués disposent de davantage de données en un laps de temps plus court. Un facteur important pour une course où le routage est interdit.

Source : Safran