VOR / Franck Cammas : "Nous avons décidé de limiter les risques stratégiques"

Toute la flotte de la Volvo Ocean Race bute sur un front qui se délite lentement, mais surtout qui se déplace vers l'Est, induisant une succession d'accélérations et de coups de frein qui ne permet pour l'instant à aucun équipage de passer de l'autre côté de cette barrière météorologique. Groupama 4, positionné le plus au Sud, a décidé de recoller au peloton pour franchir cette porte virtuelle dans la même zone.


Cela fait maintenant plus de 24 heures que ça dure ! Les six VO-70 sont en effet bloqués entre un flux soutenu de secteur Ouest qui arrive de l'Atlantique, et un régime de Nord-Est à Est généré par l'anticyclone des Mascareignes. Entre les deux, un front pluvieux se déplace lentement vers le cœur de l'océan Indien. A chaque fois qu'un voilier arrive dans ce front, il ralentit très sensiblement, puis se fait rattraper par le vent d'Ouest qui le pousse de nouveau dans cette zone sans vent établi. C'est donc une succession d'avancées avec plus de vingt nœuds de vent portant et de stops dans une brise évanescente qui anime cette deuxième étape depuis que les équipages ont quitté les côtes africaines… Et la situation météorologique n'a pas l'air de changer pour les prochaines 36 heures !

« Dès qu'on approche du front, le vent tombe ! Et derrière, la brise revient avec du Sud-Ouest assez fort… Pour l'instant, il n'y a pas assez de vent pour passer de l'autre côté afin de retrouver les alizés de Nord-Est. La situation est un peu bancale, puisque tout le monde est obligé de rester derrière cette barrière fictive sans vent, orientée Nord-Sud. C'est pourquoi la flotte est sur la même longitude. » indiquait Franck Cammas lors de la vacation radio de ce jeudi midi.

En ligne… de mire
De cette situation météorologique complexe, il en résulte que les options Sud de Groupama 4 ou Nord de Telefonica, ne portent aucunement leurs fruits puisque tout le monde s'arrête devant cette porte qui claque à chaque fois qu'un voilier pense l'avoir atteinte ! De fait, toute la flotte navigue sur une même longitude ce jeudi après-midi (38° Est) avec un écart latéral de près de 200 milles. Cette nouvelle ligne de départ devrait se resserrer au fil des heures car les navigateurs ont désormais intégré qu'il y a autant de chance que l'un des VO-70 passe dans un trou de souris par le Nord ou par le Sud. De fait, les Espagnols glissent progressivement vers leur concurrent le plus proche (Abu Dhabi) et les Français remontent vers les néo-Zélandais. Il est probable que ce décalage Nord-Sud ne soit plus que d'une cinquantaine de milles d'ici le début du week-end.

« Un passage se dessine devant nous pour franchir le front qui se déplace à une quinzaine de nœuds vers l'Est. Notre première idée était de passer par le Sud avec une ouverture à trois jours, mais une dépression se crée un peu plus au Nord et elle pourrait permettre de franchir ce front vendredi soir. Nous avons donc décidé de nous rapprocher de cette « porte » et visiblement, toute la flotte semble vouloir passer par là ! Les écarts vont donc se resserrer et tout le monde va repartir en même temps : la course va vraiment débuter à ce moment là… dès samedi matin. »

Ce minimum barométrique en cours de formation semble se positionner devant les étraves de Puma et de Camper : Groupama 4 cherche donc à gagner dans le Nord-Est tandis que Telefonica plonge un peu plus vers le Sud-Est. D'ici 24 heures, le classement ne devrait pas subir de gros bouleversements, si ce n'est que les écarts en distance au but vont diminuer au point de devenir négligeables vendredi soir : le vrai départ sera alors donné pour un long louvoyage contre les alizés de secteur Nord-Est jusqu'à atteindre l'île de Madagascar ! Il aura donc fallu une semaine de préliminaires pour que cette deuxième étape débute réellement…

Shaker indien
« Nous avons décidé de limiter les risques stratégiques en nous rapprochant de la flotte. Mais aussi, il faut surveiller le matériel car la mer est très dure depuis que nous avons passé le cap des Aiguilles. Il y a une houle puissante d'Est qui vient par devant et des vagues courtes qui viennent de l'Ouest : même au portant, nous faisons des sauts ! Personne ne peut avancer à 100% de son potentiel au risque de tout casser. Cela devrait se calmer progressivement lorsque nous aurons franchi le front… »

La situation n'est donc pas très confortable à bord de Groupama 4, même si l'opportunité de revenir au contact rend la suite de la course plus instructive pour l'équipage de Franck Cammas. Le voilier français ne devrait pas être pénalisé par ce changement de stratégie car il va bénéficier d'un bon flux de Sud-Ouest quand les autres bateaux vont continuer à buter sur le front. En tous cas, la progression vers Abu Dhabi n'est pas très rapide : seulement 950 milles parcourus en quatre jours ! Et la remontée dans les alizés ne s'annonce pas très véloce non plus, surtout qu'une faible dépression tropicale semble se former au large de Madagascar, ce qui va encore compliquer la remontée vers l'équateur…

Classement à 17 heures :
1 Telefonica
2 Abu Dhabi à 16.90 du leader
3 Sanya à 25.70 
4 Pumaà 39.10
5 Camper à 54.80
6 Groupama à 107.30

Source : Groupama