© Y Zedda / Virbac paprec 3
Tous ceux qui ont eu la chance de devenir cap-hornier le disent : les derniers jours avant le franchissement du cap mythique sont souvent les plus durs. Comme si les barrières psychologiques qui ont fait que le physique comme le mental ont encaissé l’inconfort, les coups durs, la promiscuité sans broncher, tombaient toutes les unes après les autres. L’arrivée sur le cap Horn, c’est comme un mur sur lequel on se fracasse tous les jours avant d’enfin apercevoir le symbole de la délivrance. Hugo Boss et GAES Centros Auditivos devraient en avoir fini avec les mers du sud dans le courant de la nuit et pourront ensuite mettre cap au nord . D’autant que leur route idéale semblerait passer par le détroit de Lemaire pour laisser ensuite l’archipel des Malouines à tribord. Cette lassitude, certains la ressentent plus que d’autres, quand la perspective de la bagarre pour une place au classement, disparaît et que seule la solitude du grand désert liquide semble être la perspective des jours à venir.
Un podium très convoité
Pour les concurrents revenus en Atlantique, ces gamberges ne sont déjà oubliées. Avec le retour vers des latitudes plus clémentes et les batailles stratégiques qui se profilent, tous les équipages reprennent du poil de la bête. A la vacation, les conversations se font plus enjouées et certains commencent déjà à évoquer les bons et mauvais souvenirs des mers du sud. Le fait de laisser le cap Horn dans son sillage ôte, qu’on le veuille ou non, une sorte de chape de plomb qui pèse sur le moral des troupes. Et ce, d’autant plus que tout reste possible d’ici l’arrivée à Barcelone dans les derniers jours de mars ou les premiers d’avril. En tête, le matelas confortable de Virbac-Paprec 3, est le résultat conjoint d’une vitesse plus qu’appréciable du plan Verdier-VPLP de dernière génération et d’une navigation d’une grande limpidité. Mais les deux Basques de MAPFRE n’ont en rien abdiqué et restent collés aux talons des leaders, attendant l’opportunité d’une attaque. Derrière ce duo de tête, la position de Renault Z.E. risque d’être plus inconfortable. Décalé dans le nord-est de leurs adversaires, ils ne peuvent rien faire pour empêcher le groupe de chasse de prendre la poudre d’escampette le long des côtes argentines. Le creusement d’une dépression au large des Malouines va permettre au trio composé de Neutrogena, Mirabaud et Estrella Damm, d’accrocher des vents portants qui devraient monter en régime et les propulser à belle vitesse jusqu’à la frontière brésilienne.
Nouveaux départs ?
Du côté des éclopés, l ‘équipage de Groupe Bel procède toujours à la révision de sa quille et doit s’employer à sortir le bateau de l’eau avant de décider de la suite des opérations. A bord de Mirabaud, Michèle Paret reprend des couleurs. La navigatrice a pu, pour la première fois depuis plusieurs jours, sortir de son réduit et participer à sa première manœuvre, même si elle n’a pas recouvré la totalité de ses moyens. Mais c’est de bon augure pour la suite et l’équipage, moral retrouvé, est bien décidé à jouer crânement sa chance dans la lutte pour le podium, d’autant que le bateau n’a quasiment pas souffert durant ce tour du monde. Autre bateau intact après deux mois de course, GAES Centros Auditivos, ce qui semblerait prouver qu’une présence féminine à bord est une bonne garantie de préservation du matériel. A Wellington enfin, Central Lechera Asturiana a quitté le quai où il était amarré pour se prémunir d’éventuelles conséquences du tsunami qui a ravagé le Japon ce matin. Pour les autres navigateurs dans le Pacifique, le passage de l’onde du tremblement de terre ne devrait se traduire que par un léger renflement de quelques vagues. Une fois de plus, la preuve est faite que le plus grand danger pour les marins, c’est bien la proximité de la terre…
Ils ont dit :
Iker Martinez, MAPFRE : « Sur Virbac-Paprec 3, ils font une stratégie impeccable. Et c’est là la plus grande différence. Ils sont très très bons, ils étaient là où il fallait être dans les moments décisifs. Ils ont été justes au bon moment. Dans les hautes pressions, nous voulions être plus à l’est mais nous ne pouvions pas utiliser le spi tant que la drisse n’était pas réparée. Nous n’avons pas totalement réussi. Eux ils ont fait une route très propre. Ils ont contourné l’anticyclone impeccablement. Qu’est-ce que nous pouvons faire ? Ils sont géniaux ! Ils sont devant. Là maintenant nous attendons, il y aura peut-être une opportunité. Mais cela ne dépend pas que de nous. Il faudra compter sur la météo aussi et sur eux.. »
Wouter Verbaak, Hugo Boss : « On est plutôt excités à l’idée de savoir le cap Horn, plus très loin devant nous. Mais ça ne rend pas les choses plus faciles pour autant. On a eu beaucoup de neige et des grains de grêle la nuit dernière avec un vent très instable. C’est comme si les mers du sud avaient décidé de nous montrer que l’on n’en aura pas fini tant qu’on n’aura pas franchi le Horn. De plus, les modèles météo se présentent plutôt bien pour nous pour la remontée de l’Atlantique. On a toujours dit, même quand on pointait en dernière position, que la course n’est pas terminée tant qu’on n’a pas franchi la ligne d’arrivée. On guettera la moindre opportunité et on fera tout pour la saisir. On a eu quelques soucis de générateurs, du même coup notre provision de fuel est limite. On se rationne et du même coup, on a raté la visioconférence d’hier. »
Dominique Wavre, Mirabaud : « Michèle commence à refaire ses quarts et cette histoire de maladie, ça sera du passé nous n'en parlerons plus. En ce moment, on fait du près avec une mer qui s'assagit, mais là, on attend une toute jeune dépression et des conditions tempétueuses et tumultueuses dans les jours à venir. Question plaisir de navigation, c’est mitigé, car le souci de santé de Michèle reste en arrière plan continu donc c’est difficile de profiter à plein de la navigation, mais j'espère qu'avec l'embellie physique et morale qui arrive on va de nouveau prendre du plaisir. Le souci qu’on a de l'autre est sûrement amplifié dans un couple par rapport à une équipe de mercenaire. Au final, cette course est révélatrices des avantages et des inconvnients de naviguer en couple.»
Classement du 11 février à 15 heures (TU+1) :
1 VIRBAC-PAPREC 3 à 4462,5 milles de l’arrivée
2 MAPFRE à 544,8 milles du leader
3 RENAULT Z.E à 1308,2 milles
4 NEUTROGENA à 1706,6 milles
5 ESTRELLA DAMM Sailing Team à 1790,5 milles
6 MIRABAUD à 1796,4 milles
7 GROUPE BEL à 2394,7 milles
8 HUGO BOSS à 2500 milles
9 GAES CENTROS AUDITIVOS à 2544,2 milles
10 FORUM MARITIM CATALA à 4588,3 milles
11 WE ARE WATER à 6732,5milles
12 CENTRAL LECHERA ASTURIANA à 7087,8 milles
ABN FONCIA
ABN PRESIDENT
Source : barcelona World Race