Barcelona World Race / Statu Quo à l'avant

D’avoir pu passer la porte de Crozet avant l’arrivée de la dépression tempétueuse qui s’annonçait sur zone, Jean-Pierre Dick et Loïck Peyron ne cachaient pas leur soulagement. Derrière eux, toute la flotte se dirige directement sur la marque à l’exception des derniers, toujours aux prises avec les vents d’est anticycloniques. Ambiance studieuse à bord des monocoques où la vigilance est de règle.

© Groupe Bel

Paradoxe du progrès : le développement des sciences et techniques a permis des avancées significatives pour mieux connaître les évolutions des champs de glace dans les mers du sud. Là, où quelques années auparavant, les navigateurs partaient dans l’inconnu, quitte à jouer à la roulette russe avec les growler, le développement des repérages par satellites autorise une cartographie précise des zones de dangers. C’est donc logiquement que la solution de portes éloignant les navigateurs des risques de collisions avec des glaçons pouvant peser quelques dizaines de tonnes s’est imposée. Revers de la médaille, le principe de précaution peut engendrer d’autres imprévus, comme la simultanéité possible du passage sur la porte de Crozet du leader de la course et du plus fort du coup de vent engendré par une dépression subtropicale. Il n’en a rien été heureusement et le tandem leader en a été quitte pour quelques heures de doute et d’angoisse. En tout état de cause, il suffit de se rappeler les dangers réels encourus dans de précédentes éditions du tour du monde, quand les navigateurs traversaient des zones de glaces qui tenaient du champ de mines.

Virbac-Paprec 3 maître de l’Atlantique
Ils seront bientôt neuf, avec l’entrée de Hugo Boss, dans l’océan Indien. La parenthèse atlantique est sur le point de se refermer pour la plus grosse part de la flotte. Cette section de parcours a vu Virbac-Paprec 3 remporter le trophée Atlantique Nord-Sud en 23 jours 5 heures et 40 minutes, malgré un arrêt au stand à Recife de quelques heures. Pour autant, rien ne dit que l’océan Indien rendra le même verdict. Entré avec presque 700 milles d’avance sur leurs poursuivants, le tandem de tête a rendu jusque là près de 200 milles à ses adversaires. La fin de l’océan Indien sera marquée par le passage du détroit de Cook qui se profile encore à plus de 4800 milles devant les étraves de la tête de flotte, soit environ deux semaines de course. Pour l’heure, les écarts entre le premier et ses poursuivants devraient rester stables pour les deux ou trois jours à venir. Il va falloir attendre que les navigateurs abordent la mer de Tasmanie pour espérer quelques rebondissements avant le passage dans les eaux néo-zélandaises, entre l’île du Nord et l’île du Sud.

Et pour quelques dixièmes de plus
Le statu quo attendu en tête de flotte n’empêche pas quelques bagarres à couteaux tirés. Renault ZE, bien décidé à ne pas s’en laisser compter, cherche à réduire l’écart avec Estrella Damm et Groupe Bel, en alignant régulièrement des moyennes proches des vingt nœuds. Entre les duos Kito de Pavant - Sébastien Audigane d’une part, Alex Pella et Pepe Ribes de l’autre, la course de vitesse tourne à la foire d’empoigne. De MAPFRE à Renault ZE, l’homogénéité des performances montre à quel point la bagarre ne tolère aucun relâchement. 389,7 milles en vingt-quatre heures pour le plus lent, 396,4 milles pour le plus rapide, c’est à coup de dixièmes de nœuds que se jouent les places d’honneur. Trouver le bon équilibre entre vitesse et préservation du matériel procède d’une alchimie redoutable où l’expérience joue un rôle non négligeable.
Pour Juan Merediz et Fran Palacio (Central Lechera Asturiana), ce sera bientôt l’escale à Cape Town. Compte tenu des changements de conditions attendues sur zone, les deux compères vont tout faire pour qu’elle soit la plus brève possible. Quitte à partir à la conquête de l’Indien autant essayer de la faire, le plus près possible de la caravane commune.

Ils ont dit :
Boris Hermann, Neutrogena : «Ryan et moi sommes vraiment complémentaires. A la limite, on a presque des relations plus étroites qu’un couple marié… On n’a aucune possibilité de s’échapper au delà d’une dizaine de mètres, même plutôt trois ou quatre mètres.On fait attention. Si c’est une belle journée, on en profite pour mettre de la musique de même que quand le bateau surfe, comme c’est le cas à présent. J’ai du mal à me projeter sur la longueur de la course : on essaye juste de vivre au mieux dans notre petit appartement qui bouge et de prendre chaque jour comme il vient. Je n’ai pas d’inquiétude : les mers australes vont passer vite

Xabi Fernandez, MAPFRE : « La mer est forte depuis la fin de nuit. On a 35 nœuds de vent à l’arrière du front, qu’on essaye de négocier au mieux. On espère que tout s’est bien passé pour Virbac-Paprec 3. Le bateau va bien, l’équipage aussi, même si nous sommes un peu fatigués. Le radar ne nous sert pas à grand-chose compte tenu de la hauteur des vagues. Heureusement, les nuits sont de plus en plus courtes, c’est plus facile pour la veille. »

Andy Meiklejohn, Hugo Boss : «Notre premier objectif, c’est d’amener le bateau sur la ligne d’arrivée. Petit à petit, la conduite du bateau nous paraît de plus en plus aisée, même si de temps en temps on a quelques malheurs : les voiles sont particulièrement lourdes et demandent beaucoup d’efforts à manipuler. A chaque changement de quart, on fait un petit point avec une tasse de thé. On se connaît depuis longtemps, donc on n’a pas besoin de longues explications.

Classement du 2 février à 15 heures (TU+1) :
1 VIRBAC-PAPREC 3 à 16 345,2 milles de l’arrivée
2 MAPFRE à 464,5 milles du leader
3 GROUPE BELà 602,9 milles
4 ESTRELLA DAMM Sailing Teamà 608,7 milles
5 RENAULT Z.E à 762,4 milles
6 MIRABAUD à 1278,4 milles
7 NEUTROGENA à 1312,8 milles
8 GAES CENTROS AUDITIVOS à 1716,1 milles
9 HUGO BOSS à 1952,5 milles
10 CENTRAL LECHERA ASTURIANA à 2243,7 milles
11 WE ARE WATER à 2286,4 milles
12 FORUM MARITIM CATALA à 2292,5 milles
ABN FONCIA
ABN PRESIDENT

Source : Barcelona World Race