Crédit : mark Lloyd / Oman Sail
« J’étais au près débridé, très souvent à 20 nœuds de vitesse. La mer n’était pas très forte, mais c’est vrai qu’à ces vitesses-là, il y a des chocs de temps en temps. J’étais sous deux ris dans la grand-voile et trinquette. Tout allait bien. Sur une première vague un peu plus violente, j’ai entendu un crac. Pas grand-chose, autour de la porte de la descente. Et puis sur une seconde vague, juste après, j’ai entendu un énorme crac ! J’ai pensé que c’était la dérive, mais en fait, c’était le bras tribord avant qui s’est cassé à un mètre du flotteur.A partir de là, c’est allé très vite. J’ai voulu choquer le chariot, mais en fait le bras a complètement cassé 3 ou 4 secondes après. Comme il n’y avait plus d’appui sous le vent, la plateforme s’est couchée et puis le mât a cassé. Du coup, le bateau est revenu à une gîte de 20°.
J’ai enfilé la combinaison de survie, J’ai ramené dans la cabine le radeau de survie et le grab bag (sac de secours). Lorsque le flotteur s’est complètement désolidarisé du bras, la plateforme s’est remise à l’horizontale. C’était bien que le bateau se remette à plat, malheureusement, le flotteur est maintenant contre la coque centrale et ils vont taper l’un contre l’autre. Je suis un peu inquiet, car le flotteur va beaucoup taper.
J’ai eu une seconde d’inquiétude car j’ai cru que le bateau pouvait couler. Mais très vite j’ai compris que non. J’étais un peu inquiet que le mât casse le rouf, mais la mer n’était pas si méchante que ça. Et je savais que je n’étais pas très loin des Açores et que les secours arriveraient très vite.
Ça m’a fait bizarre d’abandonner le bateau comme ça, mais d’un autre côté, j’étais totalement inutile à bord. Ils sont venus me chercher avec un petit bateau à moteur. J’ai mis mon radeau de survie à l’eau (pour le transfert, ndlr). C’était ça le plus dangereux de tout, de remonter sur le cargo. Sur le petit bateau moteur, avec un tout petit moteur hors-bord, ils étaient quatre, dont un petit bonhomme qui était terrorisé en boule parterre avec ses lunettes cassées. Il y avait trois Philippins et un Grec au volant. C’était assez folklorique. Mais c’est sûr que ça fait un peu bizarre de mettre la vie d’autres gens en danger. Je ne suis pas très fier de ça.Le cargo va s’arrêter soit à Gibraltar, soit à Malte, pour refaire du fioul. On avance à 13 nœuds vers Gibraltar. Je ne connais pas notre ETA ou notre date de passage devant Gibraltar. »
Source : La Route du Rhum