Class Ultime / Yann Guichard 4ème pour sa première Route du Rhum (Vidéo)

« Il ne me restait plus que deux jours de lyophilisés à manger. Il était temps que j’arrive. J’ai envie de me reposer un peu car je suis très fatigué. Mais je suis heureux d’être arrivé. C’était un beau Rhum, mais un Rhum spécialement difficile ! »

Crédit : AFP

En passant la ligne d'arrivée en Guadeloupe à 00 heures 58 minutes 38 secondes (heure de Paris), Yann Guichard s'est adjugé la quatrième place dans la Route du Rhum - La Banque Postale 2010. Le temps de course de Gitana 11 est de 11 jours 11 heures 56 minutes 38 secondes, sa vitesse moyenne sur l'eau est de 15,79 nœuds, sur une distance totale parcourue de 4 356 milles. Sur le parcours théorique de 3 539 milles, Yann Guichard affiche une vitesse moyenne de 12,83 nœuds. Il est arrivé 2 jours 08 heures 41 minutes 51 secondes après le vainqueur Franck Cammas (Groupama 3).

Premières réactions de Yann Guichard (Gitana 11) à son arrivée à Pointe-à-Pitre en quatrième position.

 
En passant la ligne, c’était une délivrance. Ces quatre jours ont été un petit peu long. J’ai eu le temps de cogiter. C’est un peu la délivrance de passer la ligne et de me retrouver devant tout ce public. C’est sympa. Quand on se fait décrocher en course au large comme ça, après on a le temps de voir venir les choses. Et en plus, ça s’aggravait de jour en jour et je ne pouvais rien faire pour améliorer ça. On s’est fait un peu distancé par rapport aux fichiers météo. C’était bien de s’être décalé dans le sud par rapport à Francis (Joyon) et au final, je suis resté bloqué six heures et c’est ce qui fait qu’on n’a jamais réussi à revenir sur lui. Il y a eu trois jours de grains, et avec ce bateau très léger c’était un peu de la survie pendant trois jours. J’ai failli me mettre plusieurs fois sur le toit. Il fallait quand même attaquer pour rester au contact avec les copains. Ça n’a pas été facile.

Le tour de l’île au ralenti
Le tour de l’île, il fallait le faire, c’était sympa. Il y avait du monde. Je n’ai pas eu beaucoup de vent sous le vent de l’île. Et après le canal des Saintes, je n’ai plus eu de vent du tout. J’ai juste eu une petite risée à la fin pour revenir.

Le podium
Il y a trois bonshommes plus forts que moi devant. Franck a fait une course fantastique sur Groupama 3. Francis et Thomas aussi. Je me suis fait décrocher dans le passage d’un front après les Açores et il n’y avait plus moyen de revenir. C’est un peu une déception, c’est sûr, mais il y a eu des bonnes choses.

Une transat difficile sur ce bateau
Dans le golfe de Gascogne, il ne fallait pas que j’attaque trop. Il y avait du vent et surtout de la mer. C’est un bateau bas sur l’eau, très tendu de flotteur et je l’avais déjà abîmé à l’entraînement comme ça. Donc j’ai préféré lever le pied. Mais c’est vrai que c’est un bateau sollicitant. Comme il est léger, il faut tout le temps changer de voilure dès que le vent monte ou baisse. Ça m’a fait faire beaucoup de manœuvres.

Fatigué ?
Les trois derniers jours, dans la pétole, je n’ai fait que dormir et manger. Mais avant ça, j’ai passé quatre nuits sans dormir ! ça a été rude physiquement.

Première course en solo
Ça m’a plu cette première expérience en solitaire. C’était un jeu sympa avec les copains. A part Franck (Cammas) qui est vite parti. On a vite compris qu’il serait intouchable. Mais avec Francis (Joyon), tous les deux nous nous sommes bien amusés à nous tirer la bourre.Mais déjà, sur la phase de départ, lorsque j’ai vu que Groupama 3 allait aussi vite que moi, voire un peu mieux dans le petit temps, je me suis dit “mince, c’était là un des atouts de Gitana 11 par rapport aux adversaires“. Ça ne met pas un coup au moral, mais tu te dis que ça va être dur. Mais on savait le potentiel de Groupama 3, et surtout du bonhomme. Il a fait une course merveilleuse et un choix de trajectoire fantastique.

L’accueil
Ça fait chaud au cœur. Je pensais qu’en arrivant quatrième, deux jours après le vainqueur, j’allais me retrouver tout seul, mais là il y a plein de monde, c’est génial. C’est vraiment une belle aventure.

La météo
Je n’ai jamais pris autant d’orages en toute une vie de course au large. J’ai dû me prendre 50 ou 60 orages sur la figure. C’était plus que chaud car il n’y avait pas de lune. La nuit, je me retrouvais sous un grain à 40 nœuds avec le bateau qui s’envolait. Et là, tu ne sais plus trop quoi faire !

Souvenir
L’image forte de cette Route du Rhum, c’était le départ avec tous ces bateaux. J’ai même regardé sur le site Internet pendant que j’étais en course. C’était vraiment sympa de voir tous ses bateaux, avec tous ses géants, et tous ses bonshommes qui se côtoient rarement. C’était une belle image. J’ai envie d’y revenir. J’ai un goût d’inachevé, mais j’ai vraiment pris du plaisir du début à la fin même si c’était chaud.

Que fallait-il pour gagner ?
Pour ce Rhum, il fallait faire 30 mètres. J’ai vu quelques images où l’on voit Thomas avec grand-voile à un ris et grand gennaker dans 30-35 nœuds de vent. Moi, dans ces conditions, je suis sous deux ris avec le petit gennaker et il faut serrer les fesses ! On n’était pas du tout sur le même concept de bateau. Mon bateau a des atouts, mais les conditions météo ont fait que je n’ai pas pu les exploiter.

Source : la Route du Rhum