ITW / Route du Rhum : La météo avec Sylvain Mondon et Marc Guillemot

Contrairement aux multicoques « Ultimes », le routage est interdit pour les monocoques IMOCA pendant cette édition de La Route du Rhum – La Banque Postale. Comment Marc Guillemot prépare-t-il la météo de sa course ? En travaillant avec Sylvain Mondon, prévisionniste de Météo France, au palmarès impressionnant : il a routé Lionel Lemonchois qui a pulvérisé le record de l’épreuve en 2006, et Groupama 3, vainqueur du dernier Trophée Jules Verne.

Quelles sont les hypothèses météorologiques les plus plausibles pour cette Route du Rhum – La Banque Postale ?
Sylvain Mondon : Les deux grands cas de figure sont d’une part un train de dépressions venant de l’Atlantique Nord qui oblige à traverser plusieurs fronts consécutifs et, d’autre part, un blocage anticyclonique sur les Îles Britanniques. Le premier cas impose beaucoup de stratégie, le second donne lieu à une course de vitesse vers l’alizé. La traversée se fait ensuite au portant, à plus ou moins grande vitesse. Sur le final, il y a souvent de l’incertitude : alizé ou pas ? orages ou pas ? … Le but du jeu est d’éviter les zones sans vent et les zones avec trop de vent ou trop de mer. Parfois il faut choisir la moins mauvaise des solutions.

Quels sont les pièges et les grandes difficultés ?
Quand les grands systèmes sont bien organisés, on sait gérer. C’est plus compliqué par exemple avec des fronts qui se dédoublent ou se dissipent. Dans ces cas-là, on identifie les données qui permettront de comprendre ce qui se passe en fonction des éléments visibles et avec les outils dont Marc dispose. Mais ça ne peut se faire qu’à chaud, juste avant le départ… Sinon nous devrions étudier des milliers d’hypothèses ce qui peut être contreproductif pour le skipper.

Comment travaillez-vous en amont avec Marc Guillemot ?
Dès le début de la saison, nous faisons ensemble la prise en main des outils météo du bord (Navimail et Synboat, deux logiciels de Météo France). Mais le travail de fond a été fait il y a quatre ans, et aujourd’hui nous faisons surtout de la mise à jour. De plus, nous étudions des cas types, comme ceux des éditions précédentes. Par exemple, le jour de la conférence de presse de La Route du Rhum - La Banque Postale, nous avons étudié l’édition 2006 des IMOCA. On débriefe aussi après chaque grande course : cela fait partie de la formation à long terme. La préparation d’une course s’appuie toujours sur les courses précédentes. C’est un travail de toute une saison.

Et pendant la semaine avant le départ ?
Nous nous concentrons exclusivement sur la course à venir. A partir de jeudi (28 octobre, le départ de la course étant le dimanche 31 octobre), on commence à regarder les conditions des premiers jours de course, et au fur et à mesure on allonge la période d’étude. Jour après jour on regarde les éléments météo dont la prévision est la plus stable. En fonction de chaque élément, on en déduit une approche de la gestion de la trajectoire en identifiant les moments où il y aura des choix à faire. Si la prévision est instable, on tente de localiser les zones délicates, à fort enjeu.

Indiquez-vous à Marc des points de passage à respecter ?
Non, pas du tout ! Je ne fournis pas du "clé en main", ni des "way points" à respecter, ce n’est pas mon travail. Il s’agit plutôt d’une discussion sur l’évolution des systèmes. Nous avons de vrais échanges, répétés, pour être sûr que Marc ait bien en tête les moments et les systèmes importants. Par exemple, qu’il ne prévoie pas une période de repos à un moment stratégique qui engagera la course pour quatre ou cinq jours. Dès le début de notre collaboration, Marc et moi avons toujours travaillé ainsi. C’est un échange, une discussion autour d’un écran et de modèles.

Source : SafranSixty