Crédit : J Vapillon / WOW Cap Istanbul
Après des heures compliquées pour doubler la pointe Sud-Ouest de la Sardaigne, les concurrents de la WOW Cap Istanbul s'attendaient à une répétition du purgatoire vécu lors de la journée de mardi. Mais, au lieu des petits airs émollients, c'est une jolie brise qui les attendait tout au long des deux cents milles entre la baie de Cagliari et le canal de Sicile. Et les solitaires d'avaler goulument les heures à bonne vitesse, profitant même des conditions stables pour refaire le plein de sommeil sous pilote, pour manger un premier vrai plat chaud depuis le départ, pour déconnecter un temps des obsessions du classement comme en témoigne la revendication de mise en place d'une émission de Radio Cocotier émise par certains.
Regroupement général
Après la porte de l'île del Toro, les premiers continuaient de se marquer en se calant sur une route au Sud de la route directe, comme semblaient l'indiquer les routages annonciateurs de calmes au Nord. Bien évidemment, pour leurs poursuivants, adopter la même stratégie voulait dire qu'on acceptait avec un certain fatalisme la hiérarchie dessinée jusque là. La Méditerranée ayant l'art et la manière de bousculer les conventions, les quelques audacieux qui choisissaient de sortir des sentiers battus ont vu leurs efforts récompensés. Ainsi Anthony Marchand (Espoir Région Bretagne) et, dans une moindre mesure, Jeanne Grégoire (Banque Populaire), Ronan Treussart (Lufthansa) et Romain Attanasio (Savéol) ont pu revenir dans le match sur une option un peu plus Nord. Et ce, d'autant qu'à 16 heures, le vent refusait brutalement de nouveau, obligeant l'ensemble de la flotte à passer sous génois. Les quelques concurrents qui n'avaient pas anticipé cette nouvelle bascule, se retrouvaient piégés sous le vent de la flotte, tout au moins provisoirement. Du coup, le gros de la troupe s'alignait derrière Fabien Delahaye (Port de Caen Ouistreham) toujours à la poursuite de Gildas Morvan (Cercle Vert) qui fort de son avance, devrait pouvoir gérer les derniers milles jusqu'à Ragusa, terme de cette première étape. En tout état de cause, la Méditerranée le démontre encore : dans ces eaux, il faut savoir être opportuniste et saisir la première occasion qui se présente pour marquer son avantage. En partant du principe que l'on ne saura jamais de quoi les prochaines heures seront faites.
La flotte s'apprête donc à passer sa quatrième nuit en mer pour une arrivée estimée dans la matinée de jeudi. Tous les concurrents l'avouent, cette étape commence à tirer sur les organismes : les caprices de la Méditerranée, ajoutés aux exigences de la compétition en monotype, donnent à cette première manche de la WOW Cap Istanbul, une allure de marathon disputé au rythme d'un sprint. La moindre faute d'inattention se paie le plus souvent au prix fort, d'autant que les conditions extérieures sont autant d'incitations à la nonchalance. Ulysse, en bravant le pouvoir de Poséidon, a dû patienter des années avant de rejoindre Ithaque... De quoi inciter les solitaires engagés sur la classique Méditerranéenne à une humilité certaine.
Ils racontent :
François Gabart (Skipper Macif 2010) Un François tout sucre
"Il y a un peu de fatigue c'est sûr. Je me suis retrouvé à un moment ne sachant plus où j'habitais. Mais il fallait faire avancer parce que c'était au moment où on envoyait les spis, du coup il y avait pas mal à régler et j'étais vraiment très fatigué. Maintenant c'est passé, j'ai dormi un peu, ça va mieux. Je ne sais pas combien de fois on a manœuvré depuis Hyères mais je peux vous dire que le spi est monté et descendu un sacré nombre de fois. Il a fallu matosser à bord du bateau, avancer, reculer, à gauche, à droite... On a pas mal de choses à faire. Mais quand on vient faire cette course on sait que ça va être comme ça . Il y a du jeu, c'est sympa même si c'est un peu fatigant. Sur le classement, Gildas a pris une super option hier matin. Il nous a un peu décroché. Après il y a un groupe de bateaux dans lequel on est assez serré. On est tous à moins de trois milles donc c'est pas grand chose. Quand on sait que les conditions météo sont assez hasardeuses et assez changeantes jusqu'à l'arrivée, on sait qu'il peut se passer des choses.
Je n'ai pas de plats lyophilisés à bord, je n'aime pas ça, enfin c'est surtout très compliqué à préparer et en plus je vais avoir la chance d'en manger un paquet cet hiver donc je n'en mange pas trop cette année. En Figaro Bénéteau il n'y a pas beaucoup d'intérêt à apporter du Lyophal. Je mange du frais et beaucoup de sucré, à 70% ; des compotes, du chocolat. Je dois avouer une certaine addiction pour le chocolat. Si je n'en ai pas, il me manque quelque chose.
J'ai fait une bonne première partie de course tout seul et je suis plutôt content de voir du monde. On voit tout de suite si ce qu'on fait est bien ou pas bien. C'est plutôt agréable".
Ronan Treussart (Lufthansa) Comme à la maison
"Par rapport à mon décalage, on verra ce qu'on aura sur la fin du parcours parce que la météo est quand même incertaine ; enfin la prévision est certaine mais il y a quelques petites divergences avec la réalité. Je crois qu'à un moment donné il ne faut pas trop se rallonger la route. Cette nuit quand le vent a pris un peu de gauche, il y en a qui on continué à faire la même route qu'avant, moi j'ai lofé pour me rapprocher de l'axe de la route directe. 30° au dessous, je ne pense pas que ça change réellement de la donne, a priori il va y avoir du vent jusqu'au bout. La fatigue a joué en début de nuit. Je n'ai pas pu me reposer avant parce que dans la pétole j'aime bien être présent et être à la barre. Cette nuit a été plutôt stable et c'était pas mal pour dormir et heureusement parce qu'après deux nuits sans dormir ça aurait été un peu dur. J'ai bien récupéré, je me suis fait un bon petit dej et du coup je ne suis pas mal ! Un bon petit dej pour un figariste représente un apport calorique important mais je mets aussi l'accent sur la qualité du petit déjeuner, comme à la maison : un café au lait avec des céréales, un jus d'orange, une compote, des pains au lait et un petit peu de Nutella. Il n'y a rien de tel !"
Anthony Marchand (Espoir Région Bretagne) Ca commence par le repas
"Mes impressions restent un peu les mêmes que ce que j'ai connu et ce qu'on a pu entendre : c'est dur pour les nerfs. En ce moment c'est un peu la partie de loisir et de plaisir que procure la Méditerranée. Mais quand on navigue à 15 nœuds sous spi et que d'un coup on affale le spi et qu'on est à zéro nœud, qu'il n'y a vraiment plus de vent, c'est assez dur à gérer. C'est ce qu'on a eu la nuit dernière avant l'île du Toro. J'ai essayé de faire une route un peu plus intermédiaire. J'en ai profité pour mettre le pilote et beaucoup me reposer pour ces dernières 24 heures. La nuit dernière, j'ai passé mon temps à imaginer ce qu'il pouvait se passer en météo, beaucoup de temps à la table à cartes, pas beaucoup de temps à la barre et beaucoup de temps à la sieste. Je ne pensais pas que les écarts latéraux allaient se creuser à ce point là.
Entre le bateau Lufthansa et le bateau Espoir Région Bretagne, on a fait nos courses ensemble. On a des oeufs pour le matin, du bacon grillé, des lardons , du confit de canard. La nourriture n'est pas vraiment pas un souci pour moi. Sur la Solitaire, j'ai mangé à la dure, en mode figariste. Mais je m'étais mis un point d'honneur à me faire plaisir sur la WOW Cap Istanbul, un peu comme les anciens qui naviguent encore en Figaro Bénéteau et qui sont bons sur l'eau. Ca commence par le repas".
Relevé du 22/09/2010 à 18:00:00 UTC :
1 Gildas Morvan Cercle Vert
2 François Gabart Skipper Macif 2010
3 Fabien Delahaye Port de Caen Ouistreham
4 Erwan Tabarly Nacarat
5 Eric Drouglazet LUISINA
6 Francisco Lobato ROFF / Tempo-Team
7 Nicolas Lunven Generali
8 Anthony Marchand Région Bretagne
9 Jeanne Grégoire Banque Populaire
10 Eric Péron Skipper Macif 2009
Source : WOW Cap Istanbul