Crédit : Courcoux-Marmara/Le Figaro
Ils sont marrants, ces Figaristes. Invariablement avant chaque Prologue Suzuki, ils disent tous - en substance - que l’exercice n'ayant pas de sanction sportive il faut y aller tranquille, que ce n'est qu'une façon agréable de se mettre en jambes, voire que ça porte malheur de le gagner... Et pourtant, à chaque fois, ils se bagarrent comme des chiffonniers et jouent des coudes pour se ménager la meilleure place sur la ligne et prendre un départ au pouillème de seconde près. Comme si leur survie dans la compétition en dépendait. Alors, parfois, arrive ce qui devait arriver : trop gourmands. C'est ce qui s'est passé trois fois de suite ce dimanche midi à l'aplomb des falaises de la Hève, dans du vent modéré de sud-ouest (8 nœuds mollissant sur la fin) et sur mer quasi plate mais avec un courant traversier quelque peu gênant sur la ligne. Par trois fois le Comité de course a été contraint de rappeler l’intégralité de la flotte.
Huit bateaux disqualifiés
La quatrième procédure de départ fut la bonne, à 12h56... mais pas pour tout le monde. Après trois faux-départs donc, le Comité avait en effet logiquement décidé d'envoyer le pavillon noir. Celui-ci menace de disqualification immédiate tous ceux, trop pressés d'en découdre, qui volent la ligne avant le top. De fait, la sanction est tombée pour 8 des 45 bateaux de la flotte : François Gabart (Skipper Macif 2010), Armel Tripon (Gedimat), Kito De Pavant (Groupe Bel), Laurent Pellecuer (Arnolfini.fr), Arnaud Godart-Philippe (Senoble), Eric Peron (Skipper Macil 2009), Francisco Lobato(ROFF /Tempo-Team) et Jérémie Beyou (BPI).
Au terme de près de deux heures de course, c'est Gildas Morvan qui s'imposait finalement, deux minutes devant Ronan Treussart et quatre minutes devant Thomas Rouxel. Un grand favori et deux bons outsiders forment ainsi le podium de ce tour de chauffe.
Pour tous – rappel aux ordres compris sur les départs ! - l'exercice n’aura pas été inutile. C'est avec ce Prologue Suzuki qu'on peut vérifier une dernière fois que tout fonctionne parfaitement à bord, en conditions de course, prendre quelques indications sur le plan d'eau... et tout simplement naviguer sans pression. Après-demain mardi, les choses seront radicalement différentes avec le départ du col hors catégorie de cette Solitaire du Figaro : cette fameuse première étape de 511 milles à destination de Gijón.
Ils racontent :
Gildas Morvan (Cercle Vert), vainqueur du Prologue Suzuki : « Malheureusement ou heureusement, je gagne… Normalement, c’est vrai qu’on n'aime jamais trop remporter le prologue (pour des raisons de superstition, selon laquelle celui qui le gagne ne remporte pas la Solitaire, ndr) ... mais bon, ce n’est pas de ma faute si je gagne (rire) ! Je suis parti bâbord, en bout de ligne puis j’ai dû renvoyer tribord parce que ça ne passait pas devant les autres. J’ai bien vu que le Comité de Course avait annoncé pavillon noir et je savais qu’il y avait 4 ou 5 bateaux qui avaient mordu (et donc qui seraient disqualifiés, ndr). Ensuite, j’ai fait ma course et je ne pensais plus à ça. A la première marque au vent, j’étais 5 ou 6e, ça m’allait bien comme ça, j’étais content, je me suis dit que j’allais juste continuer à naviguer propre. Et puis à la dernière bouée, j’ai doublé trois ou quatre bateaux, simplement à l’envoi de spi, j’ai bien réussi ma manœuvre pendant que d’autres s’étaient empêtrés dans la molle (…) En tout cas, cette course n’était pas du tout évidente. C’était vachement compliqué à naviguer, ça passait un coup à droite, un coup à gauche, il y avait du courant, du clapot et les algues…Mais bon, en général, les régates au Havre me réussissent bien, j’avais déjà gagné un grand prix ici ».
Ronan Treussart (Lufthansa) 2e du Prologue Suzuki « C’est sur le deuxième bord de spi pour descendre vers l’arrivée que j’ai gagné le plus de places. J’en gagne 5 sur ce dernier bord. C’était du placement par rapport au vent et par rapport aux adversaires et puis je pense que le bateau va pas mal. J’ai un nouveau spi qui me plaît bien. J’ai fait toute la course avec des algues dans l’hélice, c’est d’ailleurs pour cela que je suis parti en deuxième rideau, que je n’étais pas aux avant-postes dès le début. C’est sûr que c’est un résultat qui est pas mal. J’avais déjà fait des bonnes manches à la Solo Quiberon. Là, il y a quelques bateaux de plus donc c’est encourageant, c’est toujours mieux d’être devant, c’est sûr ! »
Thomas Rouxel (Crédit Mutuel de Bretagne) 3e du Prologue Suzuki « C’était bien compliqué, il n’y avait pas beaucoup de vent, pas mal de bascules, du clapot et du coup, ça n’était pas évident du tout. J’ai eu un peu de réussite et je m’en sors plutôt bien. Ce qui m’a sauvé, c’est d’avoir pris des bâches à Quiberon, du coup, ça m’a bien énervé et j’ai fait attention à ne pas refaire les mêmes erreurs aujourd’hui. J’ai fait attention à faire de belles manœuvres, à ne pas arriver sous la layline, ne pas me mettre en vrac et rien que ça, ça m’a permis de gagner pas mal de places ».
Source : La Solitaire
