Record / TERRE !

À quelques heures seulement du troisième des caps du tour du monde, Groupama 3 devrait cumuler plus de 200 milles sur le temps de référence au passage du cap Horn. Mais la suite du programme est moins réjouissante...

Un Horn qui mérite son nom, mais pas tout à fait en phase avec sa légende ! Car c'est avec une douzaine de noeuds de vent de secteur Nord que Franck Cammas et ses neuf équipiers arrivaient en vue des côtes chiliennes après 32 jours de mer. Mais toujours avec de la mer et un vent qui est franchement plus mou que ces derniers jours... Au point que Groupama 3 se voit contraint de passer très au large de la pointe extrême Sud de l'Amérique : les vents contraires qui se sont installés dans le détroit de Drake ralentissaient sensiblement la progression du trimaran géant.

« Nous sommes assez au large et nous ne devrions pas voir le cap. Le vent de Nord nous oblige à être assez loin de la côte chilienne : la brise est bien tombée car nous sommes dans un système de transition. Ce sera une belle délivrance c'est toujours un secteur compliqué : difficile pour le bateau, difficile pour les hommes, un peu dangereux... La fin des mers du Sud et le début de l'Atlantique. C'est un rêve de gosse qui s'accomplit pour moi. » indiquait Franck Cammas à la vacation radio de 12h30 avec le PC Course parisien de Groupama, en présence de Marc-Olivier Fogiel.

Un peu de marge...
Groupama 3 conserve tout de même un avantage sur le temps de référence, mais cet écart ne va pas se consolider au fil des heures prochaines : avec de hautes pressions qui se sont installées derrière la Terre de Feu, le vent est devenu contraire et Franck Cammas et ses hommes vont devoir composer avec des vents de face pour atteindre l'archipel des Falkland. Et si le trimaran géant devrait avoir un peu plus de 200 milles de marge sur Orange 2 en 2005 lors de son passage du cap Horn vers 19h00 TU, il va voir son écart fondre très rapidement car Bruno Peyron et son équipage avaient bénéficié de conditions exceptionnelles après le détroit de Drake.


« On a des couleurs exceptionnelles grâce à la présence de l'Antarctique pas loin. Ce matin on a vu un rorqual d'une quinzaine de mètres, c'était fabuleux car il surfait derrière nous sur la houle. C'était impressionnant de voir cette masse aller à cette vitesse-là ! C'était le premier mammifère que l'on voyait depuis le départ... On va passer le cap Horn avec une très petite vitesse, la plus petite qu'on a pu faire depuis plusieurs semaines ! Ensuite ce sera du près et on va perdre pas mal de temps par rapport au temps de Orange 2 : j`espère qu'on récupérera ça plus tard. On sent qu'on attaque le dernier tiers du parcours et c'est assez excitant pour les régatiers que nous sommes. Il y a vraiment du jeu. On va perdre notre avance dans les heures à venir, mais j'espère que ça reviendra vite. Il y aura un beau suspens jusqu'à la fin ! »

Un mythe logique
Le cap Horn marque surtout la fin de l'angoisse : parce que l'équipage fait route vers le Nord, vers la chaleur, loin des houles mauvaises, loin des glaces incertaines, loin du huis clos pesant. Le Grand Sud, ce n'est pas seulement un environnement étrange, sublime, magique, étonnant, prégnant. C'est aussi un monde fermé, de repli, de survie, d'instabilité, de doute. Essentiel pour un marin, mais profondément lourd quelque soit les personnes qui vous entourent. Le problème n'est pas d'y entrer, le souci n'est pas d'y rester, la question est de savoir si cela va durer... Et en mer, le temps n'est pas celui que l'on décide.

« C'est toujours un stress, les mers du Sud : le bateau est forcément malmené par la mer, car il faut aller vite alors que les vagues sont croisées, pyramidales. Cela entraîne des chocs violents, avec des rafales violentes : nous sommes toujours en équilibre instable ! On se demande comment ça va finir : c'est une angoisse en moins, sans parler du froid qui nous a pris ces derniers jours. »

Crédit et Source : Groupama