Transat Jacques Vabre / MIKE GOLDING YACHT RACING, TROISIÈME IMOCA A AVOIR COUPE LA LIGNE D'ARRIVEE


Certaines heures peuvent paraître parfois plus longues qu'à l'ordinaire… Les derniers milles de Mike Golding et Javier Sanso (Mike Golding Yacht Racing) ont dû paraître une éternité aux deux navigateurs englués dans des calmes à quelques milles de la ligne d'arrivée. Mais l'honneur est sauf, ils ont résisté jusqu'au bout aux velléités du tandem Michel Desjoyeaux – Jérémie Beyou (Foncia) qui, jusqu'au bout se sera battu pour accrocher le podium, histoire de ne rien regretter.



© MOCHET Marcel / AFP

On devrait infliger, aux navigateurs frustrés de ne pouvoir accéder sur le podium, la lecture obligatoire d'Alice au Pays des Merveilles. Ou du moins, celle du chapitre où la jeune fille fait la rencontre de cet animal à longues, grandes et bonnes oreilles, vêtu de sa redingote rouge, qui arpente les chemins à grande vitesse, consultant sa montre oignon et ressassant : « je suis en retard, je suis en retard… ». Sans pour autant envisager une seule seconde de changer sa course pour le moins chaotique. Car il faut une bonne dose de fatalisme, quand on est compétiteur de haut niveau, pour se satisfaire d'une place en deçà des objectifs que l'on s'était fixés. Faute de pouvoir rattraper le temps perdu, on essaye de se fixer des objectifs intermédiaires, on relativise la frustration naissante en pensant aux bons moments du retour à terre : les copains sur le quai, la première gorgée de bière, les draps secs pour un premier sommeil réparateur… Même si, bien souvent, le coucher est repoussé d'heure en heure, parce qu'on n'en a jamais fini de dérouler le fil de la traversée, des options qu'on a prises, de celles qu'on aurait dû prendre, des « si jamais » qui vous changent la face d'une course. C'est bien connu, cette manie qu'ont toujours les marins de vouloir faire des phrases…


© MOCHET Marcel / AFP
Un temps pour tout
Mais avant de basculer doucement du mode course à celui des retrouvailles, il faut encore, pour tous ceux qui restent en mer, continuer de trouver les ressorts qui feront que l'on n'aura rien à regretter, non du résultat, mais de la manière… Naviguer en course, c'est faire des choix dont on ne sait pas toujours s'ils seront les bons, c'est la règle du jeu. Mais l'essentiel, c'est de pouvoir se dire à l'arrivée que le travail a été fait conformément au niveau d'exigence que l'on s'est fixé. C'est, d'une certaine manière, ce qui a permis à Mike Golding et Javier Sanso d'accrocher ce podium devant un plateau d'une qualité exceptionnelle. Malgré de nombreux handicaps, les deux hommes ont su forcer le destin au bon moment : une préparation tardive, des soucis techniques récurrents les ont amenés à puiser dans leurs réserves. C'est à la sortie du fort coup de vent qui a cueilli la flotte au large des Açores, que le tandem a réalisé qu'il y avait un coup à jouer. Eprouvés par les conditions dantesques qui ont mis au tapis plusieurs de leurs concurrents, persuadés qu'ils avaient été lâchés, Mike et Javier ont réalisé qu'ils n'étaient en fait qu'à une quinzaine de milles de Safran, nouveau leader de la course. Dès lors, tout redevenait possible, à condition de savoir « se faire mal »… Aussitôt dit, aussitôt fait, ils ont choisi de faire abstraction de tous leurs soucis techniques : en navigant « à l'ancienne », ils ont fait de cette troisième place une sorte de quête obsessionnelle. On savait Mike Golding, dur au mal, talentueux… Il le démontre une fois de plus et justifie sa réputation de porte-drapeau des espoirs britanniques dans une course au large. Michel Desjoyeaux et Jérémie Beyou devraient, quant à eux, couper la ligne aux alentours de 21 heures (GMT+1). Auteurs d'une option sud dictée par la volonté de ne pas se jeter dans la gueule du loup, ils n'ont pas été payés de retour… Leur quatrième place après avoir compté plusieurs centaines de milles de retard sur le trio de tête, pour décevante qu'elle puisse paraître en apparence, est pourtant la démonstration du formidable talent de ces deux marins qui ont pu encore espérer tutoyer les étoiles. Malheureusement, le temps perdu ne se rattrape guère.

Mike Golding Yacht Racing, le monocoque Imoca skippé par Mike Golding et Javier Sanso a passé la ligne d'arrivée à Puerto Limon en troisième position de la Transat Jacques Vabre 2009, à 8 heures 59 minutes et 38 secondes (heure locale) soit 15 heures 59 minutes et 38 secondes (heure française). Son temps de course est de 17 jours 1 heure 29 minutes et 38 secondes à la vitesse moyenne de 11,54 noeuds. Mike Golging Yacht Racing est arrivé au Costa Rica 1 jour 6 heures 7 minutes et 28 secondes après le premier monocoque.

Source : Transat Jacques Vabre