Joint ce matin par son équipe à terre, Sébastien Josse a fait un état des lieux aussi complet que possible, et s'est montré rassurant quant à son moral et à sa forme physique. Certes extrêmement déçu, le skipper est néanmoins en mode "pragmatique" et gère une par une les avaries du bord, après avoir pris du repos et s'être copieusement alimenté. "Pour le moment, la nuit est tombée et je m'attends à ce que le vent remonte, mais de toute façon je ne peux rien faire de plus : j'ai rangé l'intérieur du bateau qui était un vrai cauchemar, j'ai bouché les fissures du roof pour que l'eau ne pénètre plus à l'intérieur, et je fais route au nord à vitesse réduite afin de pouvoir trouver une mer clémente qui me permettra de regarder les safrans. Je suis sorti faire un premier tour, mais avec encore 4 à 5 mètres de creux en avançant 5 nœuds, chaque vague qui me rattrape submerge le cockpit. Le tableau arrière est une zone exposée et je ne peux rien faire de sérieux pour l'instant."
Revenant sur les circonstances de l'incident, le skipper a noté : "Sincèrement, les conditions dans lesquelles mon quasi-chavirage est survenu sont les limites de ce que le bateau peut encaisser, mais aussi les limites de ce que l'on peut faire en solo. Quand les vagues font 10 mètres, en bas du creux il n'y a pas de vent donc on ne progresse pas alors qu'il faudrait pouvoir s'échapper, et au contraire lorsqu'on est en haut, on voudrait pouvoir ralentir pour ne pas dévaler trop vite. Dans les grains comme ceux qu'il y avait ce soir-là, on ne peut pas manœuvrer sans prendre de risques énormes, alors on attend que ça passe. généralement ça prend entre un quart d'heure et 45 minutes. C'est du réflexe, les automatismes prennent le dessus, comme cela a été le cas juste après que le bateau ait été couché et se soit remis à l'endroit. Pendant un moment, j'ai bien cru que j'avais fait la culbute complète. Je savais qu'il y avait trois choses à faire, à savoir affaler ma grand-voile, mettre le bateau dans le bon sens et commencer ma tournée d'inspection. Affaler une GV à trois ris dans 50 nœuds de vent, ça prend quand même 40 minutes, car elle pousse sur les barres de flèches, il faut monter sur chaque chariot et le forcer à descendre de tout ton poids."
"Ensuite, je me suis aperçu que le bateau ne voulait pas aller sur son cap, j'ai déconnecté le pilote et là j'ai senti que la barre était beaucoup plus dure que d'habitude. Les safrans faisant deux grosses gerbes, et j'ai compris qu'ils étaient désalignés. Ce problème, c'est ma priorité et c'est ce qui va décider de la suite des événements pour moi. Je peux solutionner le problème du roof en stratifiant, mais si je n'ai pas un système de barre fiable, attaquer le Pacifique serait trop dangereux - je devrais être fixé dans une dizaine d'heures. Le reste de mes problèmes est gênant, mais gérable, ce n'est pas un drame de ne plus avoir de pilote en mode vent par exemple, mais il faut impérativement qu'il puisse au moins fonctionner en mode compas - ce qui n'est pas le cas actuellement puisque le gouvernail est désaxé et donc il ne retrouve plus son point de référence."
"Je suis d'autant plus déçu que j'avais fait attention, que ma position plus nord était un choix conservateur. Mais c'est fait maintenant, on a change de mode, il n'est plus question de régate quelque soit la suite des événements", concluait un Sébastien dont la priorité aujourd'hui est sa sécurité personnelle et celle du navire.
Source : BT Team Ellen