Artemis Transat / J-1 avant Boston

A moins de 360 milles de Boston, Loïck Peyron contrôle son concurrent le plus proche, Armel Le Cléac’h : Gitana Eighty a enchaîné deux virements de bord la nuit dernière pour se caler au vent de Brit Air. L’arrivée du vainqueur est prévue en milieu de nuit américaine mais des brises irrégulières le long des côtes pourraient modifier ce scénario…

Difficile d’imaginer à une grosse journée de l’arrivée de The Artemis Transat, un énorme bouleversement de la hiérarchie. Car même si Armel Le Cléac’h (Brit Air) arrivait à dépasser Loïck Peyron (Gitana Eighty), il faudrait encore qu’il le devance de plus de deux heures et demie. En effet, le temps de « redressement » accordé par le Jury International au Baulois, suite à son détournement vers PRB mardi pour embarquer Vincent Riou en difficulté, lui sera retiré à son arrivée… En plus des vingt milles d’avance sur son dauphin, Loïck Peyron dispose d’une position à son vent (quarante milles plus au Sud) qui semble favorable pour la suite puisque le vent de secteur Sud-Ouest devrait tourner au Nord-Ouest dès la nuit prochaine en mollissant. Il y aura donc peut-être des zones de molle mais cela ne devrait pas permettre à son poursuivant de gratter cinquante milles ! Soit plus de 15% de la distance restante…

Un final côtier

Ce qui est sûr, c’est que la dernière journée en mer va être longue parce que la brise ne sera pas toujours très bien établie, parce qu’il y a de forts courants de marée du côté de la baie de Fundy et parce que les solitaires vont devoir veiller en permanence au trafic maritime et aux pêcheurs. Les routages annoncent toutefois une arrivée vers le milieu de la nuit (heure française) ce qui ferait franchir la ligne au premier, au coucher du soleil américain. Mais si Loïck Peyron est en droit d’espérer une troisième victoire dans cette transat anglaise, c’est Armel Le Cléac’h qui doit aussi regarder dans son rétroviseur car Yann Eliès est bien revenu dans son sillage la nuit dernière ! Seulement quatre-vingt milles les séparent… Là encore, ces deux solitaires, spécialistes du Figaro, savent à quoi s’en tenir quand la météo est incertaine et que la fin de parcours se déroule à la côte. Or les prévisions laissent entendre que le vent va de nouveau mollir et tourner de plus de 90° ! Tout reste possible…

De cinq à sept…

Avec près de 250 milles d’écart sur Eliès et 90 milles d’avance sur Samantha Davies, Marc Guillemot (Safran) a désormais suffisamment de marge pour espérer s’adjuger la quatrième place de The Artemis Transat : il devrait logiquement concéder une journée de retard sur le vainqueur car les prévisions météorologiques ne prédisent pas de changement radicaux qui relancerait la course à ce jour. Il faut juste espérer que le Breton ne se fasse pas de nouveau enliser par une bulle qui devrait passer rapidement au Sud de Terre-Neuve, avant un retour d’une brise modérée de secteur Nord-Ouest pour finir.

Mais pour ses trois poursuivants, le match est toujours extrêmement ouvert, puisque après plus de 2 000 milles de course, Samantha Davies (Roxy), Yannick Bestaven (Cervin EnR) et Arnaud Boissières (Akena Vérandas) ne sont séparés du but que d’à peine six milles ! Et les deux anciens compères de la Mini Transat ont même navigué plusieurs fois à vue depuis mercredi… Avec les vents de secteur Ouest annoncés pour la nuit prochaine, brise qui va se renforcer dans la journée de vendredi pour le peloton, jusqu’à vingt nœuds et plus, il va falloir tirer des bords avant de filer en route directe vers Boston. Ce n’est que vendredi soir que la bascule au Nord-Ouest est programmée, quand ces trois bateaux seront proches des côtes américaines. Là encore, un final de Figariste ! Pour l’octroi de la cinquième, sixième et septième place… A moins que Dee Caffari (Aviva) qui est bien revenue avant la porte des glaces, ne profite de ces conditions pour faire parler la poudre de son nouveau prototype. Avec seulement cinquante milles de décalage, c’est encore dans le domaine du possible…

Classement du jeudi 22 mai à 16h00 (heure française) :
1- Loïck Peyron (Gitana Eighty) à 361,5 milles de l’arrivée
2- Armel Le Cléac’h (Brit Air) à 20 milles du premier
3- Yann Eliès (Generali) à 103 milles
4- Marc Guillemot (Safran) à 346 milles
5- Samantha Davies (Roxy) à 441 milles
6- Yannick Bestaven (Cervin EnR) à 444 milles
7- Arnaud Boissières (Akena Vérandas) à 447 milles
8- Dee Caffari (Aviva) à 489 milles
9- Steve White (Spirit of Weymouth) à 637 milles
Abandon- Vincent Riou (PRB)
Abandon- Unai Basurko (Pakea Biskaia 2009)
Abandon- Sébastien Josse (BT)
Abandon- Michel Desjoyeaux (Foncia)


Commentaires des premiers

Loïck Peyron (Gitana Eighty) ce jeudi midi Audio
« Nous avons eu des conditions semi clémentes la nuit dernière ! On n’est pas malheureux mais il a fait très froid par contre. C’était la pleine lune et le ciel était complètement dégagé ! Ca y est, c’est le Grand Nord ! On a eu d’abord plus de vent que prévu. J’ai plutôt fait du Sud, puis route directe ! Il y a 17 nœuds de vent et j’avance à une dizaine de nœuds… Je n’avance pas très, très vite. Vincent ronfle comme un bébé… Il organise le sauvetage de son bateau au fur et à mesure. Son équipe technique a quitté Halifax sur un remorqueur de haute mer… On fait enfin du près. On est à 150 milles du Sud de la Nouvelle-écosse. On n’a pas encore rencontré de bateau, on croise très peu de monde. Je laisse bosser le radar à ce sujet. Je lui fais confiance ! Je ne suis qu’à deux jours de l’arrivée et j’espère que cela va bien se passer jusqu’à Boston… J’ai peut-être prolongé un peu trop mon bord vers le Sud, mais bon… »

Armel Le Cléac’h (Brit Air) ce jeudi matin Audio de l'après midi
« On s’en est sorti de cette zone dépressionnaire ! C’est déjà pas mal. Maintenant on a un grand ciel étoilé avec une magnifique nuit. Le vent s’est un peu calmé et on a un peu moins de mer. On a eu une vingtaine d’heures assez difficiles avec du vent assez fort jusqu’à 45 nœuds. La mer était vraiment très hachée dans tous les sens. Cela a été assez instable en force : en fait, on eu plusieurs petits systèmes de dépression. Hier, j’ai vraiment navigué « safe » car je n’ai pas de joker ! Je dois vraiment arriver à Boston... Donc j’ai perdu pas mal de milles, mais ce n’est pas très grave, je dois vraiment préserver le bateau, et rester dans ma philosophie. Depuis deux ou trois heures, je suis reparti en mode régate, j’ai repris la course à 100% avec les voiles qu’il faut et les réglages qu’il faut. On est au près serré donc on est à un peu plus de 10 nœuds de moyenne bâbord amure, et ça va être comme ça à peu près jusqu’à l’arrivée. Ca ne va pas être facile de revenir sur Loïck, je vais essayer de naviguer le mieux possible jusqu’à Boston, en faisant route directe. On va arriver dans des zones de trafic intense, donc je vais essayer d’être vigilant, mais on n’est pas à l’abri d’un problème dans les derniers milles… C’est vraiment ambiance Figaro ! Je suis agréablement surpris par l’état actuel du bateau, ensuite c’est à l’arrivée qu’on analysera en démontant le bateau et qu’on détectera ou non des petits soucis. Mais là, au premier abord, il me paraît vraiment en bon état ! La nouveauté des dernières heures, c’est le froid qui s’est installé ! On est rentré dans le courant du Labrador. C’est ambiance chaussettes et bonnet ! Aujourd’hui, je suis de nouveau en course car hier, j’ai assuré pour ne rien cassé. Maintenant je tente une option à terre en allant près des côtes de la Nouvelle-écosse : cela pourrait me faire gagner quelques milles sur Loïck ! Ce sera intéressant de voir ce que cela va donner… Je joue le jeu jusqu’au bout en abattant toutes mes cartes ! »

Source : Artemis Transat
Crédit Photo : Le Cléac'h