Incroyable ! Six mois à peine après sa victoire sur la Transat Jacques Vabre avec Pascal Bidegorry, François Gabart a remporté mardi 10 mai 2016 à 18H 24’ 39’’ (mercredi 11 mai à 00H 24’ 39’’ heure française) l’édition 2016 de The Transat bakerly, sa première course en solitaire en multicoque ! Un skipper vidé à l'arrivée mais tellement heureux de triompher sur cette épreuve mythique. A 33 ans, il complète son palmarès, déjà bien fourni : Vendée Globe, Route du Rhum, Jacques Vabre, et maintenant The Transat. "Je ne suis jamais allé aussi loin en terme de fatigue : je suis totalement cramé. Ce n’est pas facile, mais quel bonheur !"
Credit : Lloyd Images
Le grand chelem
Après la Transat BtoB en 2011, le Vendée Globe en 2012-2013, la Route du Rhum 2014 et la Transat Jacques Vabre 2015 (en double avec Pascal Bidégorry), François Gabart remporte The Transat bakerly pour ses grands débuts en solitaire en multicoques, réalisant ainsi le grand chelem. « C’est sûr que sportivement, depuis quelques années, les résultats s’enchaînent bien ; j’en suis évidemment heureux. J’aime tellement la course au large en solitaire… il n’y a aucun autre moment dans la vie où tu arrives à atteindre un tel niveau d’engagement. Au-delà des résultats et des victoires qui me comblent forcément, je prends un immense plaisir à apprendre toujours plus sur moi-même, sur mes capacités à repousser les limites. C’est très fort de vivre ça et c’est ce qui me plaît. »
Une fin de transat éprouvante
Après trois quarts de course effectués au portant dans de bonnes conditions de glisse (empruntant une route Sud pour contourner l’anticyclone des Açores), la fin de parcours a été plus compliquée pour François Gabart qui a dû puiser dans ses réserves pour garder le cap et maintenir à distance son poursuivant, Thomas Coville. « Les deux-trois derniers jours, c’était vraiment la guerre, confiait-il quelques minutes après le passage de la ligne. A la sortie de l’anticyclone, nous avons enchaîné en trois jours trois molles et deux fronts, avec notamment 24 heures à 25-30 nœuds dans de la mer formée : cela a été dur à vivre. C’est psychologiquement éprouvant quand tu te retrouves dans une zone sans vent, parce que tu ne sais pas trop ce qu’il se passe derrière.
Je ne sais pas combien de temps je vais mettre à m’en remettre, mais il faudra du temps. Je ne suis pas capable d’en faire deux dans l’année des courses comme ça.»
Et le duel au couteau face à Thomas Coville (Sodebo) ? « Les plus belles courses sont celles où il y a de la compétition, comme sur le Vendée Globe avec Armel (Le Cléac’h, ndlr), confirme François. La course avec Thomas a été très intense ; comme moi, il a le sens de la compétition et de l’engagement, je sais que quand je me bats contre lui, il est toujours à fond. »
Tourné vers le record de l'Atlantique
S’il aspire bien évidemment à fêter cette victoire puis à prendre un repos bien mérité, François Gabart, compétiteur-né, pense aussi déjà à la suite, et notamment au prochain défi qui l’attend : le record de l’Atlantique Nord en solitaire d’Ouest en Est « Pendant la course, j’ai noté pas mal de petites choses. Nous avons un potentiel de développement énorme tant d’un point de vue technique que sportif.
Je suis très content de ce que j’ai accompli, j’ai fait de belles manœuvres, je n’ai quasiment commis aucune erreur, mais en même temps, je me dis qu’il y a moyen d’aller encore plus vite. Cela me laisse encore de belles choses à imaginer et à faire dans les semaines, dans les mois et les années qui viennent. La prochaine étape sera le record de l’Atlantique qui est là aussi un exercice assez extrême, ça va être génial à vivre ! »
François Gabart à l'arrivée : "Il y a des moments magiques"
« Mes premières impressions sont super bonnes, parce que c’est ma première transatlantique en solitaire ! Et le passage au solo, ce n’est pas rien : c’est un peu magique. Je suis vraiment content de ce que j’ai fait : le bateau a un potentiel extraordinaire et les sensations à bord sont incroyables. Il faut se donner à 100% parce qu’il n’y a pas le choix : sur ces machines-là, il y a tellement de choses à faire !
Comparé à d’autres courses, le moment le plus dur fut celui où il a fallu traverser la dorsale, juste cet après-midi. Parce qu’on ne sait jamais trop comment ça va se passer. Ces bateaux vont tellement vite qu’en quelques heures, on peut perdre une trentaine de milles.
J’étais à la limite
Sur cette course, il y a deux aspects : le physique avec ces heures sans fin où on tourne les manivelles, et le mental pour gérer un bateau qui fait trente mètres et qui va à 35 nœuds pas loin de la moitié du temps… Mais il y a des moments magiques comme ce matin, sur mer plate, avant d’arriver dans cette zone sans vent : Macif était à plus de 35 nœuds sous pilote, en équilibre au dessus de l’eau, quasiment en vol ! Quelles sensations de glisse…
Je ne me suis pas fait peur, mais il y a des moments où j’ai senti qu’il n’en fallait pas plus. J’étais à la limite.
Je ne suis jamais allé aussi loin
Quel bateau ! Il n’y a pas le choix : il faut se dépasser, aller chercher au fond de soi des choses dont on ne se croyait pas capable. Et à chaque fois, on pousse le bouchon plus loin : comment arrive-t-on à dormir quand le bateau file à 35 nœuds ? Je ne savais pas que j’en étais capable…
C’est quand même unique de traverser l’Atlantique aussi vite sur un trimaran ! Ce n’est pas facile, mais quel bonheur même si je ne recommencerais pas tout le temps. C’est épuisant… Je ne suis jamais allé aussi loin en terme de fatigue : je suis totalement cramé. J’ai pu un peu me reposer, mais hier je ne savais plus où j’habitais : j’ai même eu des hallucinations. Et sur ces bateaux-là, on n’a pas le droit de partir en vrille. Heureusement, j’avais déjà vécu ça en Figaro et cela m’a permis de me recadrer. Mais les bateaux vont tellement vite qu’on n’a pas vraiment de pauses.
Le retour en mode record de la traversée de l’Atlantique en solitaire est toujours d’actualité, mais laissez-moi un peu de temps pour récupérer ! Je pense que le stand-by débutera début juin. Mais ce n’est pas le même format, le même engagement : sur un record, c’est d’abord plus court, plus simple en termes de manœuvres. Là sur The Transat bakerly, on en a fait des manœuvres, des empannages, des virements, des changements de voile, des prises de ris ! Sur un record, le jeu est différent : il y a moins d’engagement physique mais plus de stress des hautes vitesses en permanence… »
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http://www.scanvoile.com/2016/05/flash-francois-gabart-remporte-la.htmlPar la rédaction
Sources : S.André - The Transat